Homélie du Quatrième dimanche de Pâques - 11 mai 2014
10 mai 2014Actes 2, 14a.36-41 ; Psaume 22 ; 1 Pierre 2, 20b-25 ; Jean 10, 1-10
L’avez-vous remarquée en entrant ? Quand on arrive dans une église, on admire l’architecture, on regarde le chœur, l’autel, le tabernacle, l’orgue. Mais elle, y avez-vous fait attention ? C’est pourtant elle qui est chargée aujourd’hui de nous parler de Jésus : “Moi, je suis la porte !” dit Jésus. D’ordinaire, on laisse à la porte les objets encombrants. Quelquefois on met à la porte les indésirables. On dit aussi aux fidèles d’avancer et de ne pas rester près de la porte. Et les distraits se retournent quand on entend bouger la porte. Pourtant, “Moi, je suis la porte !” dit Jésus.
Souvent les porches des églises de grand style sont décorées et quelquefois très belles, vues de l’extérieur. Mais voilà, Jésus n’est pas la porte d’entrée. Non ! Il appelle les brebis chacune par son nom et il les fait sortir. Jésus est une porte de sortie. C’est dehors qu’il nous entraîne. Son projet n’est pas de nous garder dans la sécurité de la bergerie, mais de nous conduire au plein air, dans les verts pâturages. Venez avec moi sur la route des hommes. “Moi, je suis la porte !” dit Jésus.
Il y a des portes qui protègent, qui séparent, qui isolent ou qui enferment. Jésus, lui, est un passage, une communication. Quand les professionnels du bâtiment désignent portes et fenêtres, savez-vous qu’ils parlent des ouvertures ? Eh bien Jésus est une ouverture sur la rencontre. Il est celui qui marche devant et qui nous conduit ailleurs. A travers la route des hommes, il nous mène au Père. Écouter Jésus, ce n’est pas s’asseoir, c’est prendre le chemin. Portes ouvertes, murs brisés, pierre roulée, tombeau vide, brèche d’espérance. “Moi, je suis la porte !” dit Jésus. Quand tout à l’heure nous sortirons par cette porte, ne la fermons pas derrière nous comme on ferme un livre terminé, ou un dossier classé, ou un passé révolu. Non ! La porte qui est là, qui s’ouvre sur la place et sur le monde, elle est un commencement. Jésus nous y précède. Alors, à notre tour, là où nous sommes au quotidien, à nous d’ouvrir les portes et de faire des brèches. À notre tour d’appeler à sortir : “Venez, rencontrons-nous, allons ensemble !” A notre tour d’être des portes.
Notre monde est plein de portes fermées. Chacun s’enferme dans ses privilèges et renforce les serrures des ses portes pour mettre son petit patrimoine à l’abri. Chacun baisse les yeux dans l’ascenseur pour ne pas avoir à faire conversation avec le voisin de pallier. Chacun réclame des lois qui maintiennent les pauvres à distance et le tiers-monde hors de nos frontières. Chacun cherche son salut derrière des portes fermées. Eh bien, après avoir entendu Jésus nous dire qu’il est une porte de sortie, ayons l’audace d’ouvrir des portes, ayons l’audace d’ouvrir nos portes. Ouvrir le dialogue avec l’autre, rejoindre le dynamisme d’une association, permettre à l’étranger de prendre la parole, sortir de l’isolement la misère cachée, proposer un coup de main au voisin, vaincre la peur en offrant la présence, permettre l’espérance en risquant l’amitié, autant de portes ouvertes dans les murs de l’égoïsme qui permettent à chacun de changer le monde. Et si, quand vous ouvrez une porte, il y a quelques courants d’air, dîtes-vous que c’est peut-être le souffle de l’Esprit.
Sur la porte de cette église, comme sur la porte de notre maison, non pas à l’extérieur, mais à l’intérieur, non pas pour les autres mais pour nous, regardons bien, c’est écrit en lettres d’or : “Moi, je suis la porte !” dit Jésus. Faire Église ce n’est pas écouter aux portes, ce n’est pas condamner une porte, ni se cacher derrière la porte, ni mettre à la porte, mais reconnaître une voix qui nous dit : “Moi je suis venu pour que les hommes aient la vie, pour qu’ils l’aient en abondance.”
Un jour, un artiste avait réalisé une magnifique affiche. On pouvait voir Jésus frapper à une porte. Quelqu’un remarqua qu’il n’y avait ni poignée ni clenche ! En fait, l’artiste n’avait rien oublié. Mais il y a des portes qui ne s’ouvrent que de l’intérieur. Vous avez bien compris : si je n’ai pas de vie intérieure, si je n’ouvre pas ma porte au Christ, la rencontre ne sera pas possible.
“Moi je suis venu pour que les hommes aient la vie, pour qu’ils l’aient en abondance.” Aujourd’hui, Dieu me dit : “Tu es vivant. Tu n’es pas un vivant voué à la mort, mais tu es un mortel promis à la Vie”. Et ça, ça change tout !
Robert Tireau
Prêtre du Diocèse de Rennes