L'Église brésilienne critique l'organisation du Mondial
09 juin 2014Les évêques du Brésil se plaignent, dans une brochure distribuée cette semaine à travers le pays, des milliards dépensés alors qu'une partie de la population n'a pas accès aux services de base.
À une semaine du Mondial, l'Église brésilienne sort un «carton rouge». Dans une brochure distribuée cette semaine dans toutes les paroisses du pays, la Conférence des évêques duBrésil se plaint des milliards dépensés à mauvais escient pour l'organisation de la Coupe du monde de football. «L'Église veut contribuer au débat public et dire son inquiétude face à l'inversion des priorités dans l'utilisation des fonds publics, qui devraient aller à la santé, à l'éducation, à la voirie, aux transports et à la sécurité», écrivent les évêques. Ces derniers reprochent notamment aux organisateurs d'avoir chassé plusieurs centaines de déshérités vivant à proximité des stades, d'ignorer les contraintes environnementales et de livrer le sport aux grandes sociétés.
L'épiscopat brésilien souhaite par ailleurs attirer l'attention des autorités sur les risques d'exploitation sexuelle encourus par de nombreux enfants à l'occasion du rendez-vous sportif, où sont attendus quelque 800.000 touristes étrangers. Or, à ce même moment, des milliers d'écoliers seront en vacances scolaires. Déjà, lors de la précédente Coupe du monde en 2010, la criminalité sexuelle avait bondi de 66 % en Afrique du Sud. Elle avait déjà augmenté de 28 % quatre ans plus tôt en Allemagne, soulève l'ONG Childhood Brasil. D'autant que l'exploitation sexuelle des mineurs est un problème endémique au Brésil. Chaque année, près de 250.000 enfants en sont les victimes, selon l'estimation de plusieurs associations de protection de l'enfance.
Une large partie de population partage l'opinion de l'Église et un vent de fronde souffle sur le pays à seulement quelques jours de la compétition. Jeudi, après les policiers et les professeurs, les employés du métro de Sao Paulo ont lancé une grève «illimitée». L'an passé, la coupe des confédérations en juin 2013, sorte de répétition avant la grand-messe du football, avait déjà été entachée par plusieurs manifestations. Cette semaine, la présidente Dilma Rousseff a annoncé qu'elles seraient à nouveau toléréés, «pour peu qu'elles soient pacifiques» et qu'elles «n'empêchent pas la libre circulation nécessaire au Mondial». Elle a également tenu à défendre l'organisation de l'événement. La majorité des investissements publics effectués depuis 2007 l'ont été «pour le Brésil», et pas pour le Mondial, a plaidé Dilma Rousseff.
Mais le succès de la Coupe du monde, estime pour sa part la Conférence des évêques, ne se mesurera pas à l'argent qu'elle va rapporter. «Une victoire pour tous ne sera possible que si certaines exigences fondamentales sont remplies.»