Le Pape appelle au pardon pour réconcilier les deux Corées

Le Pape lors de la messe de réconciliation à Séoul, rencontre les femmes de réconfort

« Ayez confiance dans la puissance de la croix du Christ ! » C’est le message que le Pape a voulu laisser aux Coréens dont il a pris congé au cours d’une ultime messe qui a conclu son troisième voyage apostolique. Dans la petite cathédrale de Myeong-dong, perchée sur une colline noyée au milieu des gratte-ciels modernes de la mégapole de Séoul, le Pape a demandé aux Coréens d’accueillir « la grâce réconciliatrice » dans leurs cœurs et de la partager avec les autres. Une invitation claire au dialogue entre Coréens, « frères et sœurs, membres d’une unique famille et d’un unique peuple ».

Le but de cette messe était très clair : implorer de Dieu « la grâce de la paix et de la réconciliation », ce qui a une « résonance particulière dans la péninsule coréenne » divisée depuis plus de soixante ans en deux pays antagonistes. Cette prière est d’autant plus forte « quand un peuple entier élève sa supplication pressante vers le ciel ».

Le Pape a précisé toutefois que la promesse de Dieu de « restaurer dans l’unité et dans la prospérité un peuple dispersé par le malheur et la division » est « inséparablement lié à un commandement », celui de « revenir vers Dieu et d’obéir de tout cœur à sa loi ». Cette transformation du cœur peut « changer le cours de notre vie et de notre société comme individus et comme peuple ».

Critique d'une mentalité de compétition

Le Pape François a alors appelé chacun à « réfléchir sur la façon » dont il témoigne comme individu et comme communauté, d’un engagement évangélique pour les défavorisés, pour les marginalisés, pour ceux qui n’ont pas de travail ou « sont exclus de la prospérité de beaucoup ». Le Pape en a profité pour fustiger une nouvelle fois la « mentalité fondée sur la suspicion, sur l’antagonisme et sur la compétition, et appelé à favoriser plutôt une culture façonnée par l’enseignement de l’Evangile et par les plus nobles valeurs traditionnelles du peuple coréen ».

La réconciliation n’est toutefois possible que quand la porte du pardon est ouverte. C’est pourquoi le Pape a demandé aux Coréens de « rendre un témoignage convaincant au message réconciliateur du Christ », dans les maisons, les communautés et dans tous les domaines de la vie nationale. Ce témoignage doit être étendu « dans un esprit d’amitié et de coopération avec les autres chrétiens, avec les adeptes des autres religions et avec tous les hommes et toutes les femmes de bonne volonté qui ont à cœur l’avenir de la société coréenne ». Et comme pour montrer l’exemple, le Pape, lors de la bénédiction finale, a utilisé la croix byzantine que lui avait offerte avant la messe l’archevêque grec-orthodoxe de Séoul, le métropolite Ambrosios.

Le Pape, très grave, a donc élevé cette prière « pour l’émergence de nouvelles opportunités de dialogue, de rencontre et de dépassement des différences, pour une continuelle générosité à fournir l’assistance humanitaire à tous ceux qui sont dans le besoin », allusion claire aux actions menées par l’Eglise sud-coréenne envers les populations du Nord à qui elle vient en aide au gré des circonstances politiques.

Alors que la présidente sud-coréenne Park Geun-hye assistait à la messe, et que le Pape appelait à la réconciliation, rappelant que les Coréens ne forment qu’un seul peuple et une seule famille, des exercices militaires conjoints coréens et américains ont débuté dans la péninsule comme tous les ans. Une concordance de calendrier qui révèle combien la réconciliation sera difficile et fruit d’un long parcours.

Adieu aux Coréens

Cette messe de réconciliation et de paix fut aussi une messe d’adieu à la Corée et au peuple coréen. Le Pape a ainsi tenu à saluer les prêtres de Corée qui, « quotidiennement travaillent au service de l’Evangile et à l’édification du peuple dans la foi, l’espérance et la charité », contribuant ainsi « grandement à l’œuvre de réconciliation et de paix dans ce pays ».

Au début de la messe, juste avant de rejoindre l’autel, le Pape a salué chacune des sept femmes de réconfort qui, pendant la Seconde Guerre mondiale, furent réduites à l’état d’esclaves sexuelles au service de l’armée japonaise. Le Pape les a saluées, les écoutant attentivement, accomplissant un acte de reconnaissance envers ces femmes dont le sort fût ignoré jusqu’aux années 1990 et qui sont devenues depuis un enjeu politique interne et international, principalement entre la Corée du Sud et le Japon.

Lien à la Source

Retour à l'accueil