Homélie du dimanche 12 avril 2015

Le jour de Pâques, cette année encore, l’annonce de la Résurrection du charpentier de Nazareth, authentifié Fils de Dieu, a été proclamée dans les églises. Jésus est vivant !

Cette Bonne Nouvelle est devenue banale à nos oreilles habituées et ne nous fait plus grand effet. Dans le bagage des chrétiens, il y a la Résurrection de Jésus, une notion parmi d’autres, guère plus. Et j’ai envie de dire : ‘’Qu’est-ce que ça change dans nos vies ? ‘’

Le père Jean Corbineau raconte qu’un de ses amis, dans une discussion avec des gens qui lui demandaient de rendre compte de sa foi en la Résurrection de Jésus, a conclu : ’’La Résurrection, ah oui, c’est peut-être une façon de parler !’’

‘’Eh bien non et non, proteste Jean Corbineau comment peut-on laisser l’essentiel de notre foi se réduire à ‘’une façon de parler’’ ? Saint Paul est catégorique : ‘’Si le Christ n’est pas ressuscité notre foi est vide’’.

  • Tout à l’heure, en tant que Célébrant, je vous ai dit : ‘’Le Seigneur soit avec vous’’ est-ce une façon de parler ?
  • Quand je prie Jésus, est-ce que je m’adresse à quelqu’un ou pas ? À quelqu’un de vivant maintenant ou est-ce une façon de parler ?
  • L’Eucharistie, est-ce une façon de parler ? Jésus est-il au milieu de nous ou pas ?
  • Lors de la Vigile pascale, plusieurs milliers de catéchumènes ont célébré leur baptême. Sont-ils vraiment reliés à un vivant, le Christ ou est-ce une façon de parler ?
  • Si, à une femme désespérée par la mort de son mari je dis, dans un langage approximatif qui n’engage à rien, que son mari est vivant de la vie du Christ, c’est positivement intolérable, voire scandaleux.

Les façons approximatives de parler des chrétiens qui fêtent Pâques avec une tête de tous les jours, voire une tête d’enterrement, comme si Jésus n’était pas vraiment ressuscité, enterrent vraiment la proclamation de Pâques.

Nietzche disait : ‘’ Il faudrait qu’ils me chantent des chants meilleurs pour que j’apprenne à croire à leur Sauveur ! Il faudrait que ses disciples aient un air plus délivré ! ‘’

Pour les apôtres et les disciples de Jésus ce n’était pas une façon de parler. Ils ont vu leur maître après sa mort, ils ont fait l’expérience mystérieuse mais réelle de Jésus dans leur vie. Illusions ?... Naïveté ?... Non. Leur vie a été complètement transformée par cet événement, et, l’un après l’autre, ils ont préféré mourir plutôt que de renoncer à proclamer cette Bonne Nouvelle : ‘’Jésus est ressuscité. Nous en sommes les témoins’’, des témoins qui se sont laisser égorger. On peut mourir pour des idées fausses pas pour attester de ce dont on a été témoins. Les apôtres ont fait ce choix. Ils sont passés de la peur à l’audace et à la confiance.

Aujourd’hui, nombreux sont ceux, hommes, femmes, jeunes, enfants qui sont fascinés par la vie de Jésus ; nombreux sont celles et ceux qui décident de marcher à sa suite et de vivre de sa vie. Pour eux, la Résurrection n’est pas une façon de parler. Ils rencontrent Jésus dans la prière et les sacrements. Ils croient à la vie ressuscitée, pas une vie pour plus tard mais une vie dès aujourd’hui.

Sans doute connaissez-vous cette petite parabole : Un homme passe devant le chantier de trois tailleurs de pierres. Aux trois il pose la même question ‘’Qu’est-ce que tu fais ?’’ Le premier répond : ‘’Je taille une pierre’’ ; le deuxième ‘’Je gagne ma vie et celle de ma famille’’ et le troisième : ‘’Je bâtis une cathédrale’’

Chers amis, dans un monde désenchanté qui souvent ne voit pas plus loin que le bout de la dernière information, nous avons à proclamer avec enthousiasme que la vie vaut d’être vécue parce qu’il y a une Vie après la vie. Nous pouvons espérer grand. Nous bâtissons du définitif.

Depuis la Résurrection de Jésus, il y a une façon de vivre qui ne s’achève pas à la mort.

Croire à la ‘’résurrection de la chair’’ n’est pas croire retrouver nos corps à partir de nos restes et de nos cendres. Ce serait naïf et absurde de croire cela. Croire à la résurrection des corps, c’est être sûr de retrouver, sous une forme qui n’est pas décrite, ce que notre corps nous permet aujourd’hui : la relation, la communication, l’amour, tout ce qui fait corps avec nous. C’est croire aussi que dans l’au-delà, Dieu nous donnera non pas une vie désincarnée, éthérée, vaporeuse mais une vie pleinement épanouie aux dimensions d’une cathédrale.

Voici une histoire vécue. Une jeune femme marchait sur le côté d’une route qui menait à un calvaire. Un ancien du village marchait de l’autre côté de la route. Arrivée devant la croix, elle regarda longuement le corps du crucifié. On pouvait croire qu’elle priait. Elle demanda soudain : ‘’Qui est cet homme cloué sur le bois ?’’ La question laissa notre ami sans voix. Puis, calmement, comme s’il faisait une prière dans une église, le vieux monsieur laissa parler son cœur ou plutôt sa foi. ‘’Cet homme s’appelle Jésus. Il a été arrêté bien qu’innocent. On l’a flagellé. On l’a forcé à porter le bois de sa croix et on l’a cloué dessus. Mais pour moi il n’est pas perdu, il est vivant. Il est Dieu avec nous. Il est Dieu pour nous. Il nous a ouvert un chemin de vie’’.

C’est comme cela que se transmet le message de la Résurrection : quelqu’un qui parle avec assez de foi et quelqu’un qui écoute avec assez de cœur. La jeune femme dit simplement ‘’Merci’’ avec un regard qui disait beaucoup et elle poursuivit sa marche vers un autre chemin.

Si vous rencontrez sur votre route quelqu’un qui regarde un calvaire, n’hésitez pas à laisser parler votre cœur et votre foi.

Roland Chesne, Prêtre à Vernonnet

Diocèse d'Evreux

Retour à l'accueil