Homélie du dimanche 7 juin 2015

Fête du Corps et du Sang du Christ dans l’année B

Exode 24, 3-8 ; Psaume 115 ; Hébreux 9, 11-15 ; Marc 14, 12 … 26

L’histoire (légende) se passe en Inde. Un homme, plus pauvre que les autres, marche sur les sentiers brûlés par le soleil. Il mendie sa nourriture. La légende dit que c’est du blé qu’il recueille. À la fin de ses journées, son petit sac de toile est loin d’être rempli.

Un jour, son cœur a battu très fort quand il a aperçu, dans un nuage de poussière, quatre chevaux qui tiraient un carrosse : “Ah ! Si seulement ce prince me voyait et daignait s’arrêter ! S’il me donnait une pièce d’argent ou d’or !”

Eh oui ! Les chevaux ralentissent, s’arrêtent. La porte du carrosse s’entrouvre. Un homme au regard plein de bonté fait signe au mendiant de s’approcher et lui dit : “Donne-moi ton blé”. Le malheureux, déconcerté, hésite, puis retire un grain de blé de son petit sac. L’attelage repart laissant le pauvre désespéré, qui rentre chez lui, plus triste que jamais. Le soir, en vidant son sac de blé dans un bol, quelle ne fut pas sa surprise d’apercevoir un petit grain d’or ! “Ah si seulement je lui avais donné tout le contenu de mon sac !”

À chaque eucharistie, le Seigneur nous demande à nous aussi : “Donne-moi ton blé”, donne-moi quelque chose de ta vie. C’est pour ça que le pain et le vin viennent à chaque fois du milieu de notre assemblée. C’est notre blé qu’on apporte. Une catéchumène nous a raconté un jour que tout a changé pour elle quand elle a compris cet échange entre nos offrandes et la communion. “Je me demandais avant ce que chacun allait chercher dans la communion. Quand j’ai eu compris que c’était la consécration de ce qu’il avait apporté de sa vie, ce fut une vraie révélation pour moi.” La question est donc, quand nous venons à la messe, de savoir ce que nous apportons réellement de notre vie ? Trop souvent, nous laissons au prêtre le soin de présenter à Dieu le pain, là-bas, loin de nous, comme si ce pain offert n’avait rien à voir avec nous !

Le pain ! Il a toute une histoire. Il représente le travail de plein de monde. Pas seulement le travail des autres, mais le nôtre, la vie de chacun de nous, ce que nous appelons notre pain quotidien, nos joies, nos peines, notre travail, nos responsabilités, nos amours. Nous avons bien raison d’apporter cette vie chaque dimanche à la messe. Et nous avons bien raison de l’offrir à chaque messe, en offrant le pain, pour que Dieu transforme notre vie en sa propre vie. Pour que ces grains de blé – comme dans la légende – deviennent précieux comme de l’or, pour que notre pain quotidien soit transformé, transfiguré, habité, divinisé par la présence réelle du Christ. “Nous te présentons ce pain, fruit de la terre et du travail des hommes, il deviendra le pain de la vie.” Ça veut dire en clair qu’à la communion Dieu nous redonne ce pain, habité de la présence réelle du Christ.

Quand nous partageons ce pain, nous recevons en nous l’Esprit Saint, l’Esprit de Jésus. Alors nous repartons avec une véritable énergie divine pour continuer notre travail, pour tenir dans nos responsabilités, pour vivre avec la force de l’Esprit Saint, l’Esprit de Jésus, l’Esprit d’amour.

C’est important de comprendre ce qui se passe à la messe. Quelquefois, certains arrivent à la messe comme des désœuvrés. Ils n’apportent rien de ce qui fait leur vie. Eh bien je propose deux messages tout simples :

- Le premier : la messe, est la rencontre de deux présences réelles : la présence réelle du Christ, qui, elle, ne fait aucun doute, et notre présence à nous qui a quelquefois du mal à être réelle.

- Et le second : nous communions à la présence réelle du Christ pendant la messe pour devenir nous-mêmes présence réelle du Christ auprès de nos frères après la messe. Écoutez cet extrait de prière eucharistique : “Regarde avec amour, Père très bon, ceux qui vont recevoir le corps du Christ, fais qu’ils deviennent ensemble par la force de l’Esprit Saint, le corps de ton Fils ressuscité.” C’est clair : après la messe, nous devons devenir ensemble le corps du Christ, le signe visible de sa présence dans le monde.

En fait, c’est après la messe que l’on sait si la messe a été une vraie messe. Une messe vivante est une messe qui fait vivre. Et si ça arrive, ou plutôt quand ça arrive, personne ne se demande plus ce que nous sommes venus faire à la messe.

Robert Tireau, Prêtre du Diocèse de Rennes

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