Anne Hidalgo va créer un camp humanitaire pour réfugiés à Paris
01 juin 2016Un camp humanitaire pour réfugiés à Paris, aux normes de l'ONU: c'est le projet choc annoncé mardi par Anne Hidalgo qui, s'inspirant de Grande-Synthe, compte passer à la vitesse supérieure, quitte à bousculer l’État sur l'accueil des migrants.
"Nous ne pouvons plus accepter la situation humanitaire et sanitaire" à laquelle les migrants sont réduits sur les campements dans la capitale, a lancé la maire de Paris lors d'une conférence de presse.
Face à cette situation, "nous avons identifié plusieurs sites, notamment au nord de Paris, qui nous appartiennent et sur lesquels nous pourrons installer un campement, un hébergement humanitaire", a-t-elle ajouté.
Le choix devrait être annoncé "dans les jours qui viennent", et l'ouverture prendra ensuite "un mois à un mois et demi", a-t-elle estimé. Le camp sera constitué d'hébergements "modulaires", qui "puissent être installés rapidement" mais avec "tout le confort nécessaire".
Quant au dimensionnement, Mme Hidalgo a appelé au "pragmatisme" en estimant que le terrain devrait être "suffisamment vaste pour accueillir plusieurs centaines de personnes".
Surtout, ce camp respectera les "conditions réglementaires" et "celles des camps de réfugiés et de migrants édictées par l'ONU et le HCR" (Haut Commissariat pour les réfugiés), a-t-elle ajouté.
L'idée est que "nous ne voyions plus ces campements indignes" et que "les personnes qui arrivent démunies ne soient pas contraintes d'aller sous des métros ou sur des sites", comme celui des Jardins d'Eole, dans le XVIIIe arrondissement, où près de 800 personnes -- Soudanais et Afghans pour la plupart -- ont planté leur tente.
Avec les pluies diluviennes de ces derniers jours, les conditions sanitaires se sont fortement dégradées sur ce campement, dernier en date d'une longue série de squats installés puis démantelés dans la capitale depuis un an.
- Solidarité -
Dans cette démarche, le modèle revendiqué est clairement celui de Grande-Synthe (Nord), où la municipalité et Médecins sans frontières avaient ouvert leur propre camp de réfugiés en mars, malgré les réticences des pouvoirs publics.
"Aujourd'hui l'Etat accompagne sa démarche et s'est joint à lui", a souligné Mme Hidalgo, alors que les ministres de l'Intérieur et du Logement viennent tout juste d'acter, lundi, la reprise par l'Etat de la gestion de ce camp.
Le maire écologiste Damien Carême "a refusé la fatalité" et "nous allons faire la même chose à Paris", a-t-elle assuré, en soulignant son souhait que "l'Etat soit partenaire" du projet.
Au ministère de l'Intérieur, on a accueilli avec une certaine surprise le projet de Mme Hidalgo : l'Etat se prononcera "quand il aura pu prendre connaissance de ses objectifs, de son articulation avec le droit au séjour et avec les dispositifs nationaux d'hébergement et d'asile", a-t-on indiqué.
L'initiative "relève de la libre administration des collectivités locales", a-t-on commenté au ministère. L'Etat "prend ses responsabilités pour fluidifier un dispositif national cohérent", soulignait-on de même source, en rappelant que 8.500 personnes ont été mises à l'abri depuis un an lors d'évacuations de campements parisiens.
Paris connaît en effet un afflux de migrants en transit, notamment vers Calais, qui contribue à engorger la demande d'asile et à saturer les structures d'hébergement. Il y a un mois, Anne Hidalgo avait déjà tapé du poing sur la table en jugeant "impératif" de "changer de méthode".
Les associations impliquées dans l'accueil des migrants, qui avaient appelé à un "plan d'urgence" début mai, ont salué mardi cette annonce.
"C'est une initiative positive. La mairie donne l'impulsion, il faut que l'Etat s'empare du sujet car l'accueil des réfugiés est sa responsabilité", estimait Florent Gueguen, directeur général de la Fnars (Fédération nationale des associations de réinsertion sociale).
Mais les associations en appelaient aussi à une multiplication de ce type d'initiatives ailleurs en France, pour ne pas laisser Paris en première ligne. "Le dispositif doit être articulé avec l'ensemble des capitales régionales", affirmait de son côté Pierre Henry, directeur général de France Terre d'asile, évoquant une logique de "solidarité".
AFP