Les chercheurs spirituels aujourd’hui

Le Documents Épiscopat n°4 – 2016 va à la rencontre de nos contemporains, hommes et femmes qui adoptent de nouvelles manières de croire et dresse un état des lieux de cette réalité qui suscite de nouvelles questions pastorales.

Rencontre avec Philippe Le Vallois responsable de l’Observatoire des nouvelles croyances.

Qu’est-ce qui caractérise ces chercheurs spirituels ?

En premier lieu, ce sont d’authentiques chercheurs spirituels : ils ne sont ni dans le zapping, ni dans le syncrétisme. Leur recherche est réelle et exigeante. Elle est aussi très ouverte. Ils n’empruntent pas les voies balisées, vont tous azimuts. Comme sociologue, je m’appuie toujours sur le trépied : mondialisation donc pluralisation, sécularisation et individualisation. Ce troisième point est fondamental. Nous n’avons pas à faire à un collectif qu’il soit familial, villageois, paroissial ou autre. Nous sommes face à des individus. Des hommes et des femmes qui réfléchissent, ressentent, comparent, se posent des questions. À partir de là, ils sont aptes à choisir ce qui leur semble vrai et juste ou non. Certains chercheurs spirituels ont fréquenté l’Église et n’ont pas trouvé la Bonne Nouvelle que nous annonçons. D’autres au contraire reviennent. Tous les chemins sont possibles : c’est extraordinaire !

En quoi interpellent-ils l’Église ?

Les chercheurs spirituels interrogent notre façon d’être au monde en Église et notre façon de donner à goûter de la Bonne Nouvelle. Ils nous remettent face à notre propre expérience spirituelle. Où en sommes-nous ? Comment personnellement et en communauté nous laissons-nous conduire par l’Esprit saint ? Le P. Dominique Salin, s.j., dans son ouvrage L’expérience spirituelle et son langage*, rappelle que quels que soient notre réflexion et nos dogmes, tout repose sur l’expérience que les disciples ont fait de Jésus Christ. Le chrétien n’en fait pas d’autre que celle-là. Les chercheurs spirituels nous ramènent à l’essentiel. Comment témoignons-nous de cette Bonne Nouvelle, que nous sommes aimés de Dieu ? Comment cette expérience qui change nos vies nous met-elle en mouvement ? Comment la partageons-nous ? Les chercheurs spirituels entendent notre discours, voient nos façons d’agir au quotidien et interrogent : cette Bonne Nouvelle est-elle vraie pour nous aussi ?

Quelles démarches pastorales peut-on mettre en œuvre ?

Je suis toujours surpris lorsque je relis les Actes des Apôtres. La communauté chrétienne prie, partage, et le Seigneur s’adjoint à elle. Si nous développons une qualité de vie spirituelle, de prière personnelle et communautaire, alors nous avons de grandes promesses devant nous ! La façon dont nous reflétons la communion spirituelle – j’insiste car c’est la communion qui est évangélisatrice – et la façon dont elle nous transforme est une réelle interpellation pastorale. Il se passe déjà de très belles choses avec les parcours alpha, les groupes de partage biblique, les communautés nouvelles, etc. Plus largement, tous ces dispositifs doivent aussi irriguer la vie spirituelle de nos communautés paroissiales et diocésaines. Ajustons nos objectifs : si l’on souhaite remplir les églises et faire du chiffre, nous risquons d’être déçus ! Nous sommes envoyés non pas pour convertir mais pour partager, totalement et gratuitement, cette Bonne Nouvelle : « tu es follement aimé » ! Une nouvelle pastorale, pensée en fonction des lieux, contextes et personnes, peut s’appuyer sur cet élan spirituel. Sans spiritualité, le christianisme est une belle organisation caritative. Ce qui booste le cœur de notre existence, notre intériorité, c’est notre identité spirituelle : le mystère trinitaire. Certains sont dans la tristesse et le sentiment de déclin, regardons plutôt ce qui surgit et la façon dont Dieu conduit les choses malgré nos lenteurs et nos surdités. Soyons des hommes et des femmes de foi, plein d’espérance !

* L’expérience spirituelle et son langage, Dominique Salin, s.j., Éd. Facultés Jésuites de Paris 2015, 156 p., 14 euros.

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