Témoignage de Claude RAULT, évêque émérite du Sahara Algérien

Mgr Claude Rault, évêque émérite de Laghouat, au sud de l'Algérie, a donné une conférence à l'Espace Nétreville le vendredi 22 février. Un participant nous en donne un écho.

Mgr Claude Rault, père Blanc, a témoigné de sa vie en pays musulman : quarante ans dans le désert du Sahara. Le diocèse de Laghouat, dont il a été évêque de 2004 à 2017, est grand comme quatre fois la France et ne comprend qu'une centaine de chrétiens résidents !

Il a donné un témoignage de vie, de vie donnée, non pas pour convertir mais pour vivre en frère de tous les hommes, à la suite de Charles de Foucauld, et aussi un témoignage de vie reçue de la part d'amis musulmans algériens. Alors qu'il enseignait l'anglais dans un collège, une jeune fille lui a dit : « Si tu ne veux pas te faire musulman, tu vas aller en enfer... mais si je suis au paradis, je viendrai te chercher ! ». Si l'Église a pu survivre après la période de grandes violences en Algérie, entre 1994 et 1998, au cours de laquelle 150 000 à 200 000 personnes ont été tuées, dont cent quatorze imams, qui n'avaient pas voulu faire allégeance au Front Islamique du Salut, c'est, pour Mgr Rault, grâce au soutien de musulmans algériens dont les prêtres et religieuses s'étaient fait des amis.

Sur les quarante ans passés au Sahara, vingt ans l'ont été avec des activités à caractère professionnel dans des centres de formation d'apprentis appartenant à l'Église, puis dans des collèges appartenant à l'État algérien et ensuite, durant quatre ans, comme apprenti chez un artisan travaillant le cuivre, au milieu de jeunes apprentis musulmans. Les vingt autres années l'ont été comme Vicaire Général puis comme évêque de Laghouat.

Cette vie de fraternité et de dialogue avec des hommes de culture différente a été préparée puis soutenue par sa formation initiale de Père Blanc au Canada, puis par deux ans d'étude de langue arabe et d'arabologie à Rome puis à Alger et, plus tard, un an d'approfondissement de la Bible et d'islamologie.

Pour Mgr Rault, l'Église est faite pour aller à la rencontre de l'autre : Jésus a fait tomber les barrières de son temps. Il nous faut, à notre tour, vivre en frères avec tous les hommes. Lorsque Mgr Claverie a été tué, son jeune chauffeur musulman Mohamed a été tué en même temps que lui et leurs sangs ont été mêlés. Ce chauffeur avait été prévenu par Mgr Claverie du risque qu'il courait et il l'avait accepté, considérant Mgr Claverie comme un ami. Nous devons tous mêler nos bonnes volontés pour être les serviteurs du Royaume. La convivialité est la clé de l'entrée dans un vrai dialogue. Mais il nous faut garder notre identité, dans ce dialogue, et nos interlocuteurs la leur.

À la fin de son témoignage, Mgr Rault a souligné que nous ne devons pas chercher à faire nombre mais à faire signe. C'est ce qui a donné sens à sa vie en pays musulman, mais cela peut aussi donner sens à la vie dans des pays de tradition chrétienne où les chrétiens pratiquants deviennent minoritaires.

 

Philippe Blanchet

Eglise d’Evreux n°81 page 5

 

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