Homélie du dimanche 24 novembre, Fête du « Christ Roi »
18 nov. 2019Evangile Luc (23, 35-43)
« En ce temps-là, on venait de crucifier Jésus, et le peuple restait là à observer. Les chefs tournaient Jésus en dérision et disaient : « Il en a sauvé d’autres : qu’il se sauve lui-même, s’il est le Messie de Dieu, l’Élu ! » Les soldats aussi se moquaient de lui ; s’approchant, ils lui présentaient de la boisson vinaigrée, en disant : « Si tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même ! » Il y avait aussi une inscription au-dessus de lui : « Celui-ci est le roi des Juifs. » L’un des malfaiteurs suspendus en croix l’injuriait : « N’es-tu pas le Christ ? Sauve-toi toi-même, et nous aussi ! » Mais l’autre lui fit de vifs reproches : « Tu ne crains donc pas Dieu ! Tu es pourtant un condamné, toi aussi ! Et puis, pour nous, c’est juste : après ce que nous avons fait, nous avons ce que nous méritons. Mais lui, il n’a rien fait de mal. » Et il disait : « Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume. » Jésus lui déclara : « Amen, je te le dis : aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis. »
Homélie
En ce dernier dimanche de l’année liturgique, nous célébrons la fête du Christ Roi de l’univers. Le Christ n’est pas un roi à la manière des grands de ce monde qui font peser leur pouvoir sur leurs sujets. Il est un roi serviteur, « doux et humble de cœur ». L’évangile de ce dimanche nous montre un roi couronné d’épines, bafoué et mis à mort sur une croix. Tous les évangiles nous disent que par toute sa vie et jusque dans sa mort, il témoigne d’un Dieu amour. C’est sa manière d’être roi. Un jour il a dit : « Quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes. »
Saint Luc nous donne la couleur de cette royauté du Christ : « Une inscription était placée sur sa tête : Celui-ci est le Roi des juifs ». C’était un titre de dérision vis-à-vis de Jésus. C’était également très méprisant pour les juifs de la part de Pilate. Un peuple dont le roi est crucifié comme un bandit n’a pas à faire le fier. Les juifs auraient préféré que Pilate écrive : « Cet homme a dit : Je suis le Roi des juifs ». La nuance est de taille. Et pourtant c’est bien par son sacrifice que Jésus manifeste sa royauté. La croix est le trône où il est librement monté pour dire son amour son amour, non seulement aux juifs mais aussi au monde entier. Car, « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime ».
Nous pouvons maintenant regarder quelle est la réponse des hommes : Que fait-on de cette Royauté du Christ ? Dans l’évangile de ce jour, il y a une interpellation qui revient trois fois : « Si tu es le Messie… » Elle vient des chefs religieux, des soldats et enfin de l’un des condamnés à mort. Chacun voudrait que Jésus fasse quelque chose d’extraordinaire pour le sortir de cette situation. Ces paroles rappellent le récit des tentations au désert : « Si tu es le Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent du pain… Si tu es le Fils de Dieu, jette-toi en bas… » Mais le Messie n’est pas un magicien. Il ne répond rien aux provocations de ceux qui le mettent en demeure de montrer son pouvoir.
En lisant cet évangile, nous pensons aux réactions souvent entendues au sujet des victimes de la souffrance, de la misère et des catastrophes en tous genre. Même dans nos quartiers, nos villages, il y a des hommes, des femmes et des enfants qui n’ont pas le minimum pour survivre. A travers eux, c’est toujours le Christ qui est bafoué et rejeté. La tentation est grande de dire : « Si tu es le Fils de Dieu, fais quelque chose. » Quelquefois, nous entendons : « S’il y avait un bon Dieu, il n’y aurait pas tout ce mal et toutes ces souffrances dans le monde. » C’est vrai que devant tant de malheurs, certains se révoltent contre Dieu et finissent par quitter l’Église.
Mais une fois de plus, Dieu n’est pas un magicien qui va tout résoudre nos erreurs par un coup de baguette magique. Il nous a donné le monde avec tout ce qu’il contient pour que nous puissions vivre heureux. Mais quand les produits de la terre sont achetés à un prix dérisoire aux petits producteurs et revendus au prix fort dans les Centrales, c’est un peu plus de misère dans le monde. Et c’est l’homme qui en est le premier responsable et coupable, pas Dieu. Avant d’accuser Dieu, il serait bon que chacun prenne conscience de ses responsabilités. N’oublions pas qu’à travers les exclus de notre société, c’est le Christ qui continue d’être bafoué et rejeté. Si nous voulons le rencontrer, c’est vers eux qu’il nous faut aller. A travers eux, c’est le rendez-vous le plus important de notre vie qui nous attend.
En nous tournant vers la croix du Christ, nous nous unissons à la supplication du brigand : « Souviens-toi de moi quand tu viendras inaugurer ton Règne ! » Et le Christ intronisé sur la croix le gracie ; il le prend avec lui sur le chemin de la résurrection. Ce condamné a su profiter de la dernière minute pour proclamer la foi qui sauve. Cette bonne nouvelle vaut aussi pour chacun de nous. Le Christ ressuscité veut nous associer tous à sa victoire contre les forces du mal et nous introduire dans son Royaume.
En ce jour, nous nous tournons vers la croix et nous supplions le Seigneur : Souviens-toi de nous dans ton Royaume. Souviens-toi des blessés de la vie, des victimes de la précarité et des famines. Souviens-toi de ceux et celles qui ont tout perdu dans les guerres et les catastrophes en Syrie, en Irak, au Soudan, en Haïti et ailleurs. C’est auprès d’eux que tu nous attends. Nous venons à toi. Ensemble, nous voulons être témoins de l’espérance et de l’amour. Et nous avons la ferme espérance qu’un jour, tu nous répondras : « Aujourd’hui, tu seras avec moi dans le Paradis ».
Jean Compazieu