Les murmures du vieux noyer : Le Grenelle des animaux
28 nov. 2019Fatigué par le bruit infernal d’une création en colère, Dieu proposa un Grenelle des animaux. « Pourquoi ces cris ? Pourquoi ces haines ? Pourquoi ces violences ? Il faut qu’on se parle ! ». Les poissons étaient en grève et les oiseaux bloquaient les portes du ciel. On disait même que les anges n’avaient plus le moral.
Dieu voulut descendre dans la clairière pour rencontrer les animaux. Mais le vacarme augmenta. Les aigles au nom de la laïcité refusaient sa présence. Les hiboux demandaient sa démission. Les moutons bêlaient dans toutes les langues. Les souris ne voulaient pas venir, parce que les chats étaient invités. Les fourmis processionnaient, les grillons et les grenouilles se coalisaient contre le coq trop bruyant, les araignées affichaient leurs revendications et les marmottes faisaient grève de la faim.
Bref il fallut attendre mille ans pour qu’un jour au petit matin, Dieu puisse dire un mot. « Je vous ai donné des lois ! » Une huée emplit le ciel. « A bas les lois ! criait-on » « Tes lois, personne ne les respecte ! » « On se moque de toi car tu nous laisses faire ! »
On a besoin d’un Chef qui nous traite comme des bêtes, à coup de fouet !» « Seul un tyran peut rétablir l’ordre ! ». Dieu alors, demanda s’il y avait quelques hommes dans cette foule hurlante.
Un seul s’approcha, sanguinolent comme un crucifié ou un nouveau-né : « Me voici, Père ! » Dieu lui dit : « Ne leur as-tu pas appris à s’aimer ? » - « Oui, mais les progrès sont lents ! »
- « Homme, mon Fils, Je ne leur enverrai pas d’autre Roi que toi ! Je te donne mille ans de plus pour achever ta tâche ». Un instant, la création fit silence. Moralité : l’Homme n’est pas encore totalement né.
Jacques NOYER, Evêque émérite d’Amiens,