- J'ai fait l'expérience de la rencontre - par Olivier Lemaitre, diacre permanent à Privas (Ardèche)

Olivier Lemaitre a été ordonné diacre permanent à l’église Saint Thomas de Privas (Ardèche) par l’évêque de Viviers, Jean-Louis BALSA, le dimanche 7 octobre 2018. Il est professeur au conservatoire de musique de Privas et il est marié à Fatima, une musulmane pratiquante. Voici l’article paru dans « Eglise de Viviers » du mois de septembre 2019 où il donne le témoignage d’un voyage au Maroc dans la perspective d’un dialogue et d’une rencontre avec les Musulmans :
J'ai fait l'expérience de la rencontre
Parce que je crois à la force du témoignage, j'aimerais vous partager l'expérience que j'ai vécue cet été, avec mon épouse Fatima. Au soir de mon ordination, il y a bientôt un an, le père évêque m'a remis ma lettre de mission. Celle—ci précisait : « que nous étions envoyés, Fatima et moi-même, au nom du diocèse, pour nous former à l'islam »Image
Des mois ont passé et les choses se sont précisées. Cet été, nous avons suivi un séminaire d'islamologie à Rabat au Maroc. Quinze jours pour découvrir l'islam, pour se laisser surprendre, pour balayer les préjugés et les idées reçues, pour ne pas avoir nos propres références en modèle. Mais pour nous ouvrir et accueillir. C'était un beau partage. D'abord entre les Stagiaires, une vingtaine de personnes aux nationalités différentes. Beau moment de partage ensuite avec les formateurs, tous compétents et bienveillants. Enfin, avec les autochtones qui nous recevaient dans leur Royaume. Nous avons poursuivi ces quinze jours par dix jours dans la famille de Fatima, et dix jours en circuit, arpentant le Maroc du Nord au sud et de l'est à l'ouest, en passant par le Moyen Atlas, Où j'ai eu la grâce de rencontrer le dernier survivant du monastère de Tibhirine, le père Jean-Pierre Schumacher.
Je me suis senti démuni. J'allais être l'étranger, celui qu'on allait regarder, juger. J'allais perdre mes repères. J'ai eu l'impression que j'allais renoncer à quelque chose Que quelque chose auquel je tenais était en danger. Je ne lui ai pas dit, mais en y réfléchissant. j'ai admiré mon épouse, elle, une musulmane qui a suivi pendant quatre années la formation au diaconat avec un grand intérêt et un grand respect pour Jésus. Elle avait su faire appel à une capacité d'adaptation, d'ouverture incroyable...
Je bredouille trois mots d'arabe, alors quand je ne savais pas répondre aux questions que l'on me posait, j'ai parlé avec mes mains.
Quand je ne comprenais pas quelque chose, quand je me sentais perdu ou poussé dans mes retranchements, j'ai souri.
Comme je n'ai pas pu aller aux célébrations eucharistiques, il y en avait peu dans ces mois de vacances, j'ai prié, en communion avec mes frères musulmans à chaque appel du muezzin. Certes, pas comme d'habitude, mais peu importe. Ma vie, en lien avec eux, dans cette mission confiée, était un sacrement à part entière et l'important c'était de rendre grâce à Dieu.
J'ai changé mes habitudes culturelles ne mangeant plus à table mais par terre autour d'un plat, souvent avec mes mains, renonçant au café pour le thé à la menthe... n'écoutant plus de musique classique mais du folklore local. 

Qu'importe, le beau Vient de Dieu !
J'ai fait l'expérience de la rencontre. L'Évangélisation c'est ça. Être missionnaire, c'est faire l'expérience de la rencontre. Mes frères musulmans ont vu qu'un chrétien était en capacité de se laisser déplacer, par respect, par estime, par amour. Comme les moines de Midelt, je n'attendais rien de précis, je témoignais de ma vie de chrétien, simplement par ma présence dans ce pays musulman.
Le Christ nous y invite à être libre et heureux.
Dans la vie, il y a les paroles et il y a les actes. A nous maintenant de poser les actes.
Dans la joie de l'Évangile, le pape François nous dit en parlant du dialogue interreligieux : « Ce dialogue est, en premier lieu, une conversation sur la vie humaine, une attitude d'ouverture, partageant leurs joies et leurs peines. Ainsi, nous acceptons les autres dans leur manière d'être différente, de penser et de s'exprimer... La vraie ouverture est de se maintenir ferme sur ses propres convictions, mais ouvert à celles de l'autre et en sachant que le dialogue peut être une source d'enrichissement pour chacun. »
En allant au Maroc, je n'ai rien perdu Je me suis enrichi.
Alors, c'est ce que je nous souhaite pour l'année qui s'ouvre. De nous enrichir. Par notre courage et notre audace, par notre ouverture, notre accueil, par la bienveillance entre nous et avec les autres et enfin, par la confiance en nous-mêmes et dans le Seigneur.
Les méthodes comptent peu. Nous avons pour mission de favoriser la rencontre avec Jésus.
C'est important. Toute une vie peut en être transformée.


Olivier Lemaître (diacre)

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