BERTRAND GUAY / AFP  Rambouillet le 23 avril 2021 après l'assassinat de Stéphanie, policière.

BERTRAND GUAY / AFP Rambouillet le 23 avril 2021 après l'assassinat de Stéphanie, policière.

Victime d'un terroriste, Stéphanie Monfermé, policière de 49 ans, tuée vendredi 23 avril dans un commissariat de Rambouillet (Yvelines), endeuille une nouvelle fois la France. "On ne peut avoir de haine dans son cœur au nom du Christ mais c’est aussi au nom du Christ que la justice doit être rendue pour permettre la miséricorde", assure à Aleteia le père Claude Sirvent, aumônier national de Police et Humanisme, mouvement qui regroupe les policiers catholiques de France.
Il est un peu plus de 14h ce vendredi 23 avril lorsqu’un homme, Jamel Gorchene, pénètre dans le sas du commissariat de Rambouillet (Yvelines). Il sort alors un couteau doté d’une lame de 20 centimètres et poignarde à la gorge et à l’abdomen Stéphanie Monfermé, agent administratif présente dans le sas. Alors que des témoins l’entendent crier « Allah Akbar » un brigadier tire une première fois et, l’assaillant refusant de lâcher son arme, le blesse mortellement. Un assassinat qui a bouleversé les Yvelines dont la communauté chrétienne. « Les paroissiens de Rambouillet, de Saint-Léger et les catholiques des Yvelines auront à cœur de porter Stéphanie dans leur prière », a réagi dans la foulée l’évêque de Versailles, Mgr Crépy.

Mère de deux enfants, Stéphanie Monfermé, pour qui un hommage est prévu ce lundi 26 avril en fin de journée à l’hôtel de ville de Rambouillet et dont les obsèques vont avoir lieu dans les prochains jours, n’est pas la première policière victime d’une attaque terroriste. Jean-Baptiste Salvaing, policier, et sa compagne Jessica Schneider, secrétaire au commissariat de Mantes-la-Jolie, tués à coups de couteau à leur domicile de Magnanville (Yvelines) en juin 2016, le policier Xavier Jugelé tué sur les Champs-Élysées en avril 2017, Arnaud Beltrame en mars 2018, trois policiers à la préfecture de police de Paris en octobre 2019…
Terrassé, abasourdi, le père Claude Sirvent, aumônier national de l’association « Communauté chrétienne des policiers de France-Police et Humanisme », revient pour Aleteia sur ce nouveau drame qui vient endeuiller la communauté policière et la société toute entière. Prêtre mais aussi commandant de police, il était à la direction générale de la police nationale lors des attentats de 2015.
Aleteia : L’assassinat de Stéphanie Monferméest-il l’épreuve de trop pour la communauté policière ?
Père Claude Sirvent : En apprenant cet acte odieux j’étais terrassé, abasourdi. La savoir assassinée dans le sas de son commissariat… Au-delà de l’émotion, c’est un assassinat de plus qui s’inscrit malheureusement dans une continuité depuis plusieurs années sur le territoire national. Pour l’avoir vécu lors de ma carrière, je sais combien les policiers, les agents administratifs donnent de leur temps, de leur vie, au service du prochain. Stéphanie laisse aussi un mari et deux enfants. En tant que prêtre je crois bien évidemment en l’espérance mais la réalité, celle d’aujourd’hui, est baignée par ces assassinats, ces violences urbaines. Il faut décortiquer la nature de l’acte. C’est un attentat islamiste, terroriste, commis par un djihadiste au nom du Dieu de cet assassin. Il y a une réelle volonté du tuer des policiers.

Comment accompagner un tel événement ?
Il faut dire les choses, clairement, pour aller de l’avant. Au nom du Christ nous ne pouvons pas avoir de haine dans notre cœur mais c’est aussi au nom du Christ que le jugement est nécessaire, que la justice doit être rendue pour qu’il puisse y avoir miséricorde. Les policiers ont besoin d’entendre un message de vérité et de justice. Ce n’est qu’alors que l’on peut entrer dans la consolation. L’Église doit être à leurs côtés afin de les accompagner avec douceur dans cette consolation.

Quel est l’environnement dans lequel les policiers évoluent ?
On n’imagine par la violence qui est constamment présente dans les commissariats avec les affaires courantes à traiter, les gardes à vue… C’est une fourmilière qui ne s’arrête jamais. Ils côtoient quotidiennement l’humanité la plus sombre. À cela il faut ajouter un petit salaire et une vie personnelle parfois compliquée. C’est à cause de cette violence que les suicides sont aussi nombreux – une cinquantaine chaque année.

Il arrive un moment où l’humanité doit prévaloir sur le crime.

En apprenant cet assassinat vous avez écrit « Face à cette violence aveugle et totalement inhumaine sachons répondre unis dans la force, la dignité et la responsabilité ». Qu’est-ce que cela signifie ?
Le plus beau titre du policier est d’être gardien de la paix. Ils doivent rester unis autour de cette mission sacrée afin de la tenir et de l’offrir aux citoyens. La dignité est ce don qui nous a été donné par Dieu. Nous sommes tous, peu importe notre confession, des enfants de Dieu. Aussi abominable que soit l’acte commis, chacun reste digne aux yeux de Dieu. Terroriste, assassin d’enfant… Comme l’avait dit avec beaucoup de justesse Robert Badinter, il arrive un moment où l’humanité doit prévaloir sur le crime. Attention, cela ne veut pas dire que justice ne doit pas être rendue mais il faut garder à l’esprit la dignité de l’être humain qui nous est donnée par Dieu. Enfin vient la responsabilité, celle des paroles prononcées, des actes posés. Nous devons être responsable pour être co-créateurs de ce monde. Il faut dire les choses sans tiédeur, fortement, mais ne jamais être dans un débordement. Il nous faut tenir la paix.

Agnès Pinard Legry 

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