Le pape s'est rendu seul à l'ambassade de Russie près le Saint-Siège. Un geste fort | © Church of England/Flickr/CC BY-NC-ND 2.0

Le pape s'est rendu seul à l'ambassade de Russie près le Saint-Siège. Un geste fort | © Church of England/Flickr/CC BY-NC-ND 2.0

«C’est unique dans l’histoire de la papauté. Je suis bluffé!», confie une source diplomatique à cath.ch, le 25 février 2022. Le pape s’est rendu seul à l’ambassade de la Fédération de Russie près le Saint-Siège, accomplissant un geste «fort» au lendemain de l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
«C’est un signal assez fort et historiquement jamais vu!», lance la source diplomatique qui analyse le geste du pape pour cath.ch. Le pape s’est rendu à l’ambassade de la Fédération de Russie dans la matinée du 25 février, Via della Conciliazione, à Rome, à quelques centaines de mètre du Vatican. Une visite que le pontife a effectuée au lendemain de l’invasion de l’Ukraine par La Russie, et alors que le Bureau de presse du Saint-Siège a annoncé l’annulation de son déplacement à Florence, en raison de douleurs au genou. Une visite qui fera date dans l’histoire du Saint-Siège.
Il peut arriver qu’un chef d’État se déplace dans une ambassade, mais à de très rares occasions seulement. «Soit pour l’inauguration de celle-ci, ou pour signer un cahier de condoléances à l’occasion d’une grande catastrophe ou du décès d’un chef d’État ami, par exemple».
On pouvait s’attendre à ce que le pontife se rende plutôt à l’ambassade ukrainienne, mais cela aurait pris une tournure émotionnelle et compassionnelle attendue, relève le diplomate. «Le pape n’est pas allé chez Abel, il s’est rendu chez Caïn».
Un geste d’humilité
Dans le cas présent, le pape a voulu marquer la gravité de la situation, mais, précise la source à cath.ch, il s’agit d’un geste d’humilité, plus que de protestation. «Dans ce dernier cas, le diplomate russe aurait été convoqué au Palais apostolique, ce qui se fait habituellement. En même temps, cela met une forte pression sur l’ambassadeur».
Ce qu’ont pu se dire les deux hommes? «Difficile à dire, on peut imaginer que le pape a demandé l’arrêt des hostilité. A vrai dire, peu importe, car dans le cas présent, le geste est éloquent: le pape se déplace en personne, pour tendre la main à l’agresseur et pour montrer que tout n’est pas perdu». Autre singularité notable: le pape aurait pu venir avec le Cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État du Saint-Siège, ou le cardinal Paul Richard Gallagher, le secrétaire pour les relations avec les États. Il n’en a rien été.

Deux hommes qui se connaissent
Alexandre Avdeïev, ambassadeur de Russie près le Saint-Siège, est un diplomate chevronné qui a commencé sa carrière en 1968 | Wikimedia commons CC-BY-SA-2.0
Le fait que les deux hommes se connaissent bien a sûrement joué un rôle, note encore le diplomate. Alexander Avdeïev, l’actuel ambassadeur russe près le Saint-Siège, n’est pas le dernier venu:  il était déjà dans la Carrière à l’ère soviétique. «C’est un diplomate chevronné que le pape connaît bien. Les deux hommes se rencontrent une, deux, voire trois fois par an depuis 2013». Alexandre Avdeïev a pris ses fonctions à Rome un mois avant l’élection de François.
Le pape François a agi en chef d’État. Cet acte est très politique, souligne notre interlocuteur. Le pape sait qu’il n’est pas seulement l’évêque de Rome, mas aussi chef d’État et il se sert de ce statut si particulier pour essayer à tout prix de sauvegarder la paix. «A l’audience générale du 23 février, il décrète un jour de jeûne pour la paix, le 2 mars prochain, à l’occasion de l’entrée en Carême. Deux jours plus tard, il se rend à l’ambassade de la Fédération de Russie, au lendemain de l’invasion de l’Ukraine par les troupes russes».
«On retrouve bien sûr la signature de François, ce "pape des surprises", qui va aux périphéries en faisant fi du protocole, mais sans jamais oublier la symbolique» (cath.ch/bh)

Bernard Hallet
© Centre catholique des médias Cath-Info, 25.02.2022

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