Après un long périple, Bintou Diallo est bien insérée à Vernon. ©Nicolas Apaire

Après un long périple, Bintou Diallo est bien insérée à Vernon. ©Nicolas Apaire

Bintou Diallo, habitante de Vernon (Eure), a mené un âpre combat pour faire sa vie en France.

Son sourire semble ne jamais la quitter. Bintou Diallo, installée à Vernon depuis 3 ans, n’a pas toujours été aussi joyeuse. La Normande de 37 ans a bataillé durant des années pour se faire une place en France, face à une administration parfois difficile à appréhender.

Départ de Guinée

En Guinée, il est courant de voir des jeunes filles rapidement mariées.

Encore adolescente, je ne voulais pas me marier à un inconnu. J’ai donc organisé mon départ vers la France avec ma mère et mon oncle.

Bintou Diallo, ancienne réfugiée guinéenne.

C’est en 2007 que le voyage se déroule, faisant donc de Bintou Diallo une réfugiée. Accueillie par des compatriotes, en région parisienne, à Bobigny, l’acclimatation n’est pas facile : « n’ayant pas encore de situation régulière, j’ai monnayé mon hébergement par des courses et l’entretien de l’appartement ».

Une longue attente administrative

Après cinq mois dans cette situation, la jeune femme va alors faire une demande à France terre d’asile pour lui permettre de faire avancer les choses.  Elle s’y rend tous les jours, jusqu’à ce qu’on lui permette d’être hébergée dans un hôtel, à Boissy-Saint-Léger, dans le Val-de-Marne, en 2008.

La demande d’asile de Bintou Diallo s’étale sur deux ans.

L’OFRA, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, lui refuse son titre de séjour, car de la famille pourrait l’accueillir au Sénégal.

Désarçonnée par cette réponse, la Guinéenne dépose un recours, qui est rejeté.

« J’ai quitté mon hébergement pour rejoindre le CADA, le centre social pour demandeurs d’asile » précise Bintou Diallo. Ne pouvant y résider tous les jours, elle se débrouille pour éviter de se retrouver seule la nuit. Une OQTF, obligation de quitter le territoire, va finir par lui être remise.

Premier emploi en France

Sans réelle avancée sur ses perspectives de régularisation, la demandeuse d’asile va être hébergée chez une connaissance burkinabée, qui l’engage pour garder sa fille. Cela permet à Bintou Diallo de quitter le CADA, en 2010, à Saint-Germain-en-Laye (Yvelines). Un évènement va alors faire bouger les choses : l’anniversaire de la jeune fille de l’employeuse de Bintou Diallo. 

Sympathisant avec l’un des invités, un Vernonnais, elle le rejoindra à Vernon quelque temps après, en novembre 2010.

Une rencontre décisive

Vivant avec son compagnon, la trentenaire est victime d’une dépression, en apprenant le décès de sa mère.

C’est à cette période que la Guinéenne va découvrir l’ADEM, l’association d’entraide aux migrants, à Vernon.

Séparée de son partenaire, l’ADEM va lui permettre de trouver un logement au FJT, le foyer de jeunes travailleurs.

Afin de s’occuper, n’ayant toujours pas de possibilité de trouver un emploi, du fait de sa situation irrégulière, Bintou Diallo s’engage au Secours catholique

Elle y donne des cours de français pour les migrants et fournit son aide partout où l’association la demande.

Un jour, j’ai échangé avec une dame de l’association, ancienne directrice d’école. Elle m’a parlé de sa fille, professeure de français, qui s’est proposée pour me donner des cours.

Bintou Diallo, ancienne réfugiée guinéenne.

La fin d’un long cauchemar

Par la suite, les évènements s’enchaînent pour Bintou Diallo : elle obtient en 2013 son DAEU (diplôme d’accès aux études universitaires), représentant le Secours catholique au Conseil national de lutte contre les exclusions, ce qui la fait voyager d’Évreux à Matignon, pour y défendre le droit des personnes en difficulté, et se marie, dans la foulée, la même année.

Durant trois ans, la Guinéenne étudie et obtient en 2017 le diplôme d’assistante sociale. C’est à cette époque qu’elle fait la connaissance du père Denis Chautard, secrétaire de l’ADEM.

« Il m’a beaucoup aidée dans mes démarches administratives. Je lui dois beaucoup encore aujourd’hui » souligne Bintou Diallo. Souhaitant désormais se consacrer à son métier, la future Vernonnaise postule sans trop y croire, à un poste à l’Éducation nationale.

On m’a rappelée en me disant que mon secteur était en tension, et qu’il n’y avait pas de raison qu’on ne m’embauche pas. J’ai expliqué ma situation, et mon interlocutrice a souhaité faire avancer ma situation.

Bintou Diallo, ancienne réfugiée guinéenne.

Après un énième parcours administratif semé d’embûches, Bintou Diallo obtient une carte de séjour d’un an, ce qui lui permet enfin de travailler, en tant qu’assistante sociale scolaire. Elle va d’ailleurs passer un concours de la fonction publique pour obtenir le statut de fonctionnaire.

« J’ai été reçue première de ma promotion, en ayant 20/20 », se réjouit la Normande.

Elle sera naturalisée Française en 2019, là encore, grâce à l’aide du père Denis Chautard. Déclarant avoir longtemps vécu « dans l’attente de voir les choses avancer », Bintou Diallo remercie « toutes les personnes qui m’ont accompagnée ».

Revenant sur son parcours, elle parle de « persévérance et de patience  » en n’hésitant pas à aller toquer à toutes les portes, ce qui lui a permis de faire de vraies rencontres.

Nicolas Apaire

 

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