Priorité aux pauvres et aux migrants
14 sept. 2023La liberté est un des grands dons de Dieu. Par elle, en particulier, nous sommes à l’image de Dieu ; par elle, nous ressemblons à Jésus, qui a été l’homme le plus libre qui soit. Personne ne pourra être plus libre que lui. Seulement, la liberté n’est pas celle que nous pensons souvent…
Pour nous, être “libres”, c’est faire tout ce qui nous plaît, même si cela est nuisible aux autres et à nous-mêmes, et cette liberté-là conduit à la guerre, et cette liberté-là conduit à la violence, au manque de respect, au mépris du bien des autres et du bien commun, en un mot à la loi de la jungle. Pour cela, Dieu s’est fait homme pour sauver le genre humain.
L’incarnation du Christ signifie que Dieu a pris corps dans la réalité historique et qu’en y pénétrant, Il l’a transformée pour toujours en se faisant compagnon de l’humanité dans ses joies et dans ses peines. Jésus a choisi de vivre et de naître parmi les plus humbles, loin des vanités et des prétentions des classes dirigeantes de son époque. Étant riche, il s’est fait pauvre pour nous sauver. En Jésus, Dieu s’est rendu accessible au point d’être vulnérable aux excès des hommes. Sa vie tout entière tire sa signification de son agir en faveur des pauvres, des marginaux, des étrangers, des femmes et des malades.
Lorsque l’individu parvient à surmonter ses peurs et ses préjugés, il ouvre une brèche qui permet de refaire le lien avec lui-même, à partir de cette rencontre avec l’autre. Il peut alors commencer à regarder autrement celui qui apparaît différent par sa race, sa classe sociale ou sa culture.
En vérité, cette reconnaissance du sujet s’avère désarmante pour les deux parties… Celui qui prend la peine d’entrer en relation d’égalité avec un plus petit que soi, découvre quelque chose qui ressemble à la liberté ; il s’inscrit déjà dans un processus de libération de soi et de valorisation de l’autre. Il donne ainsi moins de prise aux conditionnements sociaux et aux préjugés inculqués par un système qui tend, aujourd’hui, à prôner l’individualisme et le repli sur soi.
Un jour, dans le diocèse de Dom Helder Camara, situé dans le nord-est du Brésil, un pauvre s’introduisit par effraction dans l’église pour voler. Il défonça la porte du tabernacle, s’empara du ciboire et s’enfuit avec objets sacrés et argent. Quelqu’un retrouva les hosties que le voleur avait jetées dans la boue. Les fidèles se scandalisèrent de ce “sacrilège” et furent d’avis que la peine la plus sévère devait être infligée au criminel.
Dom Helder Camara exprima un tout autre point de vue, qui nous interpelle : “Nous sommes choqués parce que notre frère, ce pauvre voleur, a jeté les hosties, le Christ eucharistique, dans la boue. Mais le Christ vit tous les jours dans la boue, chez nous au Nordeste !
Ouvrons les yeux ! Tous les jours, les pauvres sont condamnés à une existence de boue ! Et le Christ qui vit en eux, vit aussi dans la boue.”
C’est sans doute le message que le pape François ne manquera pas de rappeler lors de sa visite à Marseille en clôture des rencontres méditerranéennes qui se tiendront dans la cité phocéenne du 17 au 24 septembre.
Claude SIRVENT
Prêtre de la Mission de France
Aumônier national de Police et Humanisme
Revue « Le Veilleur » n° 192
Septembre 2023 page 8