Michel Rigaud avait 8 ans en 1944. Il se rappelle parfaitement de la libération de Privas, préfecture de l'Ardèche. (WILLY MOREAU / RADIO FRANCE)

Michel Rigaud avait 8 ans en 1944. Il se rappelle parfaitement de la libération de Privas, préfecture de l'Ardèche. (WILLY MOREAU / RADIO FRANCE)

Michel Rigaud avait 8 ans en 1944, lorsque Privas a été libérée. Il en garde un souvenir à la fois doux et amer, "ça a été une joie extraordinaire, explique-t-il. Lorsque les résistants sont entrés dans Privas, toutes les fenêtres se sont pavoisées de drapeaux français." Il se rappelle aussi être allé avec d'autres enfants chez un imprimeur pour récupérer des chutes de papiers de toutes les couleurs afin de décorer les rues de la ville de guirlandes.

Malheureusement juste après les festivités, sont venues les arrestations. "Il y a eu des arrestations de femmes, qui avaient fricoté avec des Allemands, raconte Michel. Mais parmi ces femmes-là, il y avait des gens qui n'avaient pas fricoté avec les Allemands. Par exemple, la vieille dame qui tenait un bistrot, on lui a reproché d'avoir servi à boire aux Allemands et ils l'ont tondue."
Des représailles parfois inacceptables

Michel garde un souvenir particulièrement dur de ces arrestations et surtout du fait que les femmes tondues ont été obligées de défiler dans les rues de la ville. "Ce qui était déplorable, c'est que ces femmes, on les a promenées dans les rues de la ville et il y avait des gamins entre 12 et 14 ans qui criaient : 'Les tondues ! Les tondues ! Les tondues !', se souvient-il. Ils sont passés devant mon père et moi et il m'a dit : 'Michel, que je ne te vois pas dans un truc pareil'. Il sentait que c'était scandaleux." 

Autour de lui, une foule hilare assiste à ce spectacle et Michel ainsi que d'autres étaient déçus des actions des résistants. "Elles méritaient peut-être une punition, moi, je ne suis pas en mesure de le dire, dit Michel. Mais c'étaient des femmes qui simplement avaient aimé quelqu'un. On s'attendait à autre chose de la Résistance, ils étaient des justiciers."

Après les arrestations ont lieu les fusillades des collaborateurs et si certains étaient réellement coupables, un des responsables d'Ardèche a dit un jour à Michel "qu'ils étaient allés un peu vite en besogne". Ce dernier se souvient particulièrement d'un jour d'exécution où 12 hommes ont été fusillés : "Il y avait un jeune résistant, qui levait le menton pour parler aux autres parce qu'il était assez petit. Il a donné une paire de gifles à un vieux monsieur et moi, je l'ai interprété comme s'il avait giflé son propre père devant 80 personnes qui regardaient le spectacle."

La vie a fini par reprendre son cours, mais Michel avait un camarade, dont la mère a été tondue, "avait-elle été proche des Allemands d'un point de vue sentimental ?, se demande-t-il. Je ne sais pas, mais moi cette femme, je l'ai connu comme une maman et mon ami n'a jamais pardonné à la Résistance d'une manière générale, parce qu'ils ont tondu et humilié sa mère."

Willy MOREAU, Radio France

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