Image de Sainte Claire donnée lors de la Neuvaine précédent sa Fête par les Clarisses de Tahiti en 2012

Image de Sainte Claire donnée lors de la Neuvaine précédent sa Fête par les Clarisses de Tahiti en 2012

Il y a 800 ans, dans la nuit du 19 mars 1221, le lendemain du dimanche des Rameaux, Claire d’Assise, toute habillée, s’enfuit pour rejoindre le groupe de François d’Assise dans la petite chapelle de la Portioncule qui existe encore aujourd’hui. C’est pourquoi les Clarisses du monde entier et toute la famille franciscaine célèbrent cette date, qui commémore la fondation de l’Ordre de Sainte-Claire, aujourd’hui répandu dans le monde.

Claire, avec François -nous ne devons jamais l’oublier, car ils avaient promis, dans leur pur amour, qu’ils «ne se sépareraient plus jamais», selon la belle légende de l’époque-, représente une des figures féminines les plus lumineuses de la chrétienté. Il est donc bon de toujours la rappeler comme exemple pour beaucoup de femmes. A cause d’elle, il y a des millions de Claire et Maria Claire dans le monde.

Elle, descendante de la noble famille d’Assise, les Favarone, et lui, François, fils d’un riche et influent marchand de tissus, des Bernardone, et tous deux renoncent aux richesses propres à leur condition...

A 16 ans, elle a voulu rencontrer le déjà célèbre François, qui avait 30 ans. Bona, son amie intime, raconte sous serment selon les actes de canonisation que, entre 1210 et 1212, Claire « est allée plusieurs fois discuter avec François, en secret, pour ne pas être vue par ses proches et éviter les médisances ». De ces deux années de rencontre naquit une grande fascination l’un pour l’autre. Comme le dit un de ses meilleurs chercheurs, le suisse Anton Rotzetter dans son livre Claire d'Assise : la première femme franciscaine (Vozes 1994) : «en eux a fait irruption l’Eros dans son sens le plus pur et profond, car sans l’Eros il n’y a rien qui ait valeur, ni science, ni art ni religion, l’Eros est la fascination qui pousse un être humain vers un autre et le libère de la prison de lui-même» (p. 63).

Cet Eros a fait que les deux s’aiment et prennent soin l’un de l’autre, mais dans une transfiguration spirituelle qui a empêché qu’ils se ferment sur eux-mêmes. François affectueusement l’appelait «mon Plantain».

Cette nuit du 19 mars, Claire s’enfuit en cachette de sa maison et arriva à la Portioncule. Dans des lumières tremblantes, François et ses compagnons l’ont accueillie avec joie. Et en signe de son incorporation au groupe, François lui a coupé ses cheveux blonds. Puis Claire revêtu le vêtement des pauvres, sans teinture, ressemblant plus à un sac qu’à une robe. Après la joie et les nombreuses prières, elle a été accompagnée au couvent des bénédictines à quatre kilomètres d’Assise. Seize jours plus tard, sa petite sœur, Inès, s’enfuit aussi et se joignit à elle. La famille Favarone a essayé, même avec violence, de reprendre ses filles; mais Claire s’est agrippée aux nappes de l’autel, montrant sa tête rasée et empêchant qu’on la prenne.

Elle a fait preuve du même courage lorsque le pape Innocent III n’a pas voulu approuver sa demande de vœu de pauvreté absolue. Elle a tant lutté que le pape a finalement accepté. L’Ordre des Clarisses est né. La scène n’a rien à envier en créativité, audace et beauté aux meilleures scènes d’amour des grands romans ou films. Comment une jeune femme riche et belle pourrait-elle fuir son foyer pour rejoindre un groupe semblable aux «hippies» d’aujourd’hui? Car nous devons représenter ainsi le mouvement initial de François. Il s’agissait d’un groupe de jeunes riches, donnés aux fêtes et aux sérénades, qui ont décidé un jour de choisir le détachement total et la pauvreté sévère, en suivant les traces du pauvre Jésus. Ils ne voulaient pas faire la charité pour les pauvres, mais vivre avec eux et comme eux. Et ils l’ont fait avec un esprit de grande jovialité, sans même critiquer l’Église opulente des papes.

Ils ont cultivé ensemble trois passions tout au long de leur vie : la passion pour le pauvre Jésus, la passion pour les pauvres et la passion de l’un pour l’autre. Dans cet ordre. Ils ont alors planifié la fuite de Claire pour rejoindre le groupe qui voulait vivre l’Évangile pur et simple. Son corps intact après 800 ans prouve, une fois de plus, que l’amour est plus fort que la mort.

Leonardo Boff (frère Franciscain jusqu’en 1992 et père de la « théologie de la libération »)

ANUARIO ESPIRITA 2015 pages 74-75

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