faim monde   

Le rapport « L'état de l'insécurité alimentaire dans le monde en 2012 », publié par l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) révèle que malgré une amélioration globale, la sous-alimentation fait encore des ravages dans le monde.

Un habitant de la planète sur huit va se coucher chaque soir le ventre vide. Soit 868 millions de personnes, 12 % de la population mondiale. C'est ce que révèle le rapport «L'état de l'insécurité alimentaire dans le monde en 2012», publié par l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Dans ce document, l'organisation internationale précise que plus de 98 % des êtres humains touchés par ce fléau (852 millions) vivent dans les pays en voie de développement. Il rappelle aussi que plus de 2 milliards de Personnessouffrent des séquelles de carences en micronutriments. La sous-alimentation constitue toujours au XXIème siècle le Premierrisque sanitaire mondial. Et le fléau continue de tuer : cinq millions de morts en 2012. Dont la moitié était des enfants.

C'est principalement en Asie du Sud (304 millions de personnes), mais surtout en Afrique subsaharienne, où la faim touche plus de 55 % de la population (234 millions de personnes), que se concentre la plus grande partie des êtres humains soufrant de sous-alimentation. Viennent ensuite l'Asie de l'Est, 'Asie du Sud Est, l'Amérique latine et les Caraïbes, l'Asie de 'Ouest et l'Afrique du Nord, et enfin les régions développées, .e nombre d'individus souffrant de la faim a globalement diminué : en 1990, la FAO estimait ainsi à 980 millions le nombre de personnes sous-alimentées dans les pays en voie de développement.

Des progrès donc... Pas forcément. Car en observant les chiffres de plus près, il apparaît que, si la faim a effectivement reculé au cours des deux dernières décennies, notamment dans certains pays comme l'Inde, la Chine, le Brésil ou l'Indonésie, elle a augmenté dans d'autres états du monde, pour l'essentiel en Afrique subsaharienne. Entre 1990 et 1992, cette région comptait en effet 170 millions de personnes sous-alimentées. Vingt ans plus tard, il y en avait... 64 millions de plus. En fait, la FAO relève que c'est surtout entre 1990 et les années 2007-2008 que les progrès mondiaux ont été réalisés en matière de réduction de la faim. Depuis 2008, année de crise et d'augmentation globale des prix des denrées alimentaires, l'organisme a observé un ralentissement et un tassement des progrès. De quoi risquer d'empêcher l'atteinte de l'Objectif du millénaire pour le développement (OMD) visant, d'ici à 2015, à réduire de moitié le nombre de personnes souffrant de la faim dans le monde.

Le renforcement de l'agriculture familiale au service de la nutrition

La plupart des populations très pauvres tirent une bonne partie de leurs moyens d'existence de l'agriculture et d'activités apparentées. La croissance agricole obtenue par les petits agriculteurs, et notamment les femmes, réduit efficacement la pauvreté extrême et la faim. La FAO rappelle que «pour que la croissance économique se traduise par une amélioration de la nutrition des plus démunis, il faut que les pauvres soient parties prenantes du processus de croissance et qu'ils en bénéficient». Une solution que porte également le CCFD-Terre Solidaire à travers les projets qu'il soutient un peu partout dans le monde, notamment en Afrique subsaharienne. La FAO souligne notamment l'importance de concentrer les efforts dans le domaine agricole, et particulièrement l'agriculture familiale, car «la croissance agricole est un outil particulièrement efficace de lutte contre la faim et la malnutrition ».

Et selon le rapport de 2012, les pouvoirs publics ont un rôle déterminant à jouer dans cette stratégie de lutte contre la faim et la malnutrition, notamment par le soutien prioritaire à l'agriculture familiale puisque cette dernière, au-delà de créer des millions d'emplois, représente 70 % de l'alimentation dans le monde. Un investissement «rentable», puisque la croissance permet dans un premier temps une amélioration de la nutrition en donnant aux plus pauvres les moyens de mieux diversifier leur alimentation. Résultat, cette meilleure alimentation va constituer le moteur essentiel d'une croissance économique durable et profitable à ceux qui en ont le plus besoin. 

44 % des céréales servent à nourrir... le bétail

Le problème, c'est que l'agriculture mondiale ne répond pas aujourd'hui aux besoins des plus démunis. La preuve ? Près de la moitié des céréales cultivées sur la planète (44 %) sont utilisées pour nourrir du bétail et des animaux destinés à la boucherie, principalement consommés dans les pays du nord. Les céréales servent également à produire des agro carburants. Il faut par exemple 232 kilos de maïs pour obtenir l'équivalent d'un plein de 50 litres d'éthanol. Soit les calories suffisantes pour nourrir un enfant pendant un an. Cet essor de l'agro business suscite du coup bien des convoitises de la part d'investisseurs qui n'hésitent pas à s'accaparer des millions d'hectares de terre dans les pays du Sud : l'équivalent de quatre fois la France en 10 ans. D'où l'interpellation de la FAO à l'égard des décideurs politiques.

Au travers des actions menées sur le terrain avec ses partenaires, le CCFD-Terre Solidaire s'inscrit parfaitement dans l'esprit des solutions proposées par le rapport de la FAO. Et ce, même si le document comporte des limites. «La faim est ici mesurée par une estimation des besoins caloriques des personnes, ce qui est nouveau dans les rapports de la FAO précise Jeanne-Maureen Jorand, chargée de mission plaidoyer sur la souveraineté alimentaire au sein du CCFD-Terre Solidaire. Cette méthode est plus précise qu'avant, mais elle ne prend pas en compte certains éléments de conjoncture qui ont une conséquence directe sur l'accès des peuples à la nourriture, comme par exemple l'environnement politique des pays, ni le choc des variations de prix sur les marchés internationaux, en particulier pour les pays qui importent beaucoup». Autre lacune du document, l'absence de prise en compte de l'accès aux ressources alimentaires. «Il faudrait par exemple multiplier des bourses d'échanges alimentaires et les structures de gestion comme des silos à grains ou des banques de semences, indique Jeanne-Maureen Jorand. Car il arrive fréquemment que des régions soient victimes de mauvaises récoltes alors qu'à quelques centaines de kilomètres, d'autres soient en surproduction». Autant de pistes de travail qui sont, plus que jamais, au cœur de l'action du CCFD-Terre Solidaire. Et pour laquelle nous avons plus que jamais besoin de votre soutien.

La Lettre du CCFD Terre Solidaire

N° 54 Juillet 2013 pages 1-2

http://ccfd-terresolidaire.org/

 

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