Les enfants solarisés « sans papiers »
Voici le cri du coeur d'une "conscience citoyenne", que comme délégué diocésain de la Pastorale des Migrants je vous invite à accueillir même s'il peut, pour certains, paraître "exagéré" !
Près de 12,4 millions d'élèves, de la maternelle à la terminale, ont repris le chemin de l'Ecole, une rentrée marquée cette année, par l'angoisse et la crainte de voir certains des élèves manquer à l'appel.
Ils sont étrangers et enfants de sans papiers, la rentrée des classes marque pour eux la fin du sursis. Le ministère de l’Intérieur et le gouvernement ont entrepris une campagne d’intimidation et d’expulsion contre une population dangereuse entre toutes, des enfants !
A quoi ressemble la rentrée d'un élève sans papiers ? A un parcours du combattant sans fin. Si on ignore le nombre exact d'enfants concernés, des milliers sont sous le coup d'une possible expulsion au moment de la rentrée. Sur les 30 000 dossiers de régularisation déposés en préfecture, 24 000 seront refusés, d'après le ministère de l'Intérieur, et on estime à deux en moyenne le nombre d'enfants concernés pour chaque dossier.
A la question faut-il intégrer ou ne pas intégrer ? Le ministre de l’intérieur répondait globalement et avec fermeté : intégrer, oui, mais pas tout le monde ; tout dépend… Mais tout dépend de quoi ? D’une liste de six critères que les candidats à la régularisation devaient remplir et soumettre à l’appréciation des différentes préfectures dont ils dépendent. Le premier de ces critères est que "au moins un des parents" ait sa "résidence habituelle en France depuis au moins deux ans". La "scolarisation effective d'un des enfants au moins en France depuis septembre 2005, la naissance ou la résidence habituelle en France d'un enfant depuis qu'il a atteint au plus l'âge de 13 ans, l'absence de lien de cet enfant avec le pays dont il a la nationalité", constituent les critères. Enfin, il convenait que les préfets tiennent compte de la "contribution effective du ou des parents à l'entretien et à l'éducation de l'enfant depuis sa naissance", de même que de l'existence d'une "réelle volonté d'intégration de ces familles". Cette dernière, énumère la circulaire, passe par "la scolarisation des enfants, leur maîtrise du français, le suivi éducatif, le sérieux des études et l'absence de trouble à l'ordre public".
 

Plusieurs enfants de notre école sont aujourd’hui sous le coup d’un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière, nous ferons ce qu’il faut pour que ça ne se produise pas. Désobéissance civile ? Peut être bien mais ne pas choisir, c’est choisir de laisser faire…
Il est inconcevable d’imaginer les copains de nos enfants, menottés, entravés, bâillonnés et scotchés à leurs sièges d’avion pendant que nos enfants étudieront paisiblement « J’écris ton nom, Liberté » d’ Eluard ou «Etranges étrangers » de Prévert et que, sans trembler, on effacera des listes les noms et prénoms des bannis.
Il est de notre devoir d’agir pour tirer ces enfants (déjà souvent malmenés par des existences chaotiques), de la situation qui pourrit leur vie. Il ne faut pas ajouter aux tragédies que sont les biographies de certains d’entre eux l’angoisse d’être expulsés d’un pays où ils avaient cru trouver un refuge.
Il s’agit en fait, symboliquement de montrer la solidarité que nous sommes prêt à manifester envers ces enfants et leurs familles, et de militer contre l’application de la circulaire d’interpellation. Les étrangers qui arrivent en France, sans papiers ont la plupart du temps des raisons fortes de quitter leur pays et un grand courage pour le faire : comment ne pas le comprendre ? Il y a un tel écart entre pays riches et pays pauvres.
Mais c’est aussi faire la démonstration aux yeux de nos enfants que les discours sur « les valeurs » ne sont pas des mots creux. Il est de notre devoir de montrer à la jeune génération qu’on dit sans repères, que la justice, l’altruisme, la solidarité, le dévouement à une cause commune ne sont pas des mots vides de sens. Et que certains adultes savent faire ce qu’il faut quand des enfants sont victimes d’injustice ou plongés dans des situations intolérables.
Sur la base d’une indignation de départ, c’est une nouvelle force solidaire qui est née. Grâce aux sans papiers.
Nous refusons donc de nous faire les complices d’une conception de « l’ordre public » rigoureusement opposée aux bases mêmes de l’école laïque. Dans notre école, il n’y a pas de clandestins. Nous n’accepterons pas que ces enfants soient kidnappés et disparaissent à seule fin de remplir les objectifs du plan décidé au ministère de l’Intérieur. Nous ne demandons rien d’extraordinaire.
Nous en appelons au cœur de tous les parents, pour que soit organisé un cordon de protection pour la défense des enfants et des adolescents qu’on veut priver d’école, pour qu’ils puissent faire leurs études et soient régularisés. Pour que les copains de nos enfants sachent quel sens en France, on donne au mot « humanité ».
A chacun désormais de juger en conscience !

Catherine
 
 
Retour à l'accueil