Contribution de la Mission de France au Synode des évêques sur la famille – janvier 2014
16 janv. 2014
LES DÉFIS PASTORAUX DE LA FAMILLE
DANS LE CONTEXTE DE L’ÉVANGÉLISATION
Une des orientations de la Mission de France, votée en 2007, porte sur « les questions nouvelles autour de la famille, la vie conjugale, l’éducation des enfants et la relation homme/femme. » La prise en compte, par l’Eglise de France en 2011, de la très grande diversité familiale (familles recomposées, familles monoparentales, etc.) nous encourage car dans chaque famille, il y a des membres qui vivent une réalité conjugale et familiale particulière. La figure traditionnelle de la famille est devenue une parmi d’autres. Notre contribution a pour source le témoignage les nombreux couples et familles avec lesquels nous sommes en compagnonnage, la réflexion pastorale et théologique menée avec d’autres dans le cadre de la pastorale familiale (préparation au mariage, accompagnement des couples, pastorale des séparés-divorcés-remariés).
Ce que donne à penser la rencontre des couples lors des préparations au mariage
La célébration vient en cours de chemin : 90 à 95% des couples vivent déjà ensemble quand ils adressent leur demande. La célébration religieuse intervient parfois tardivement, après 8 ans, 15 ans, voire 30 ans de vie commune. La célébration du mariage n’est plus, de manière générale, une célébration du démarrage du couple mais un sacrement de la route ! C’est une consécration d’un chemin déjà commencé, c’est une manière de signifié qu’on est engagé dans la construction d’une famille. Le PACS est assez souvent une première étape sociale : si cela facilite les démarches administratives, c’est aussi une décision de couple qui semble jouer un rôle symbolique, comme l’était les fiançailles il y a quelques années.
La forte exigence affective fait reculer l’engagement définitif : la diversité des chemins conjugaux ne traduit pas une moindre exigence des couples vis-à-vis du mariage, au contraire. Aujourd’hui l’union conjugale repose d’abord sur le lien affectif, dans un contexte où les fonctions symboliques de l’homme, de la femme, du père et de la mère sont profondément transformées. Cela rend la construction d’un couple plus complexe, que l’on soit ou non chrétien. L’engagement à vie ne va plus de soi.
La signification du sacrement de mariage est hors de portée : La plupart des couples qui viennent demander le mariage ont peu ou pas de formation catéchétique (au mieux arrêtée à la fin de l’école primaire à l’âge de 10 ans), ont peu de pratique des sacrements, ne connaissent pas la présence vivante du Christ crucifié et ressuscité. C’est pourquoi 80% des couples ne demandent pas vraiment un mariage chrétien sacramentel mais seulement « un mariage à l’église ». Ils veulent donner une certaine dimension sacrée à leur couple, mais rarement un véritable engagement à œuvrer pour la construction d’un projet matrimonial. L’incohérence à accorder le sacrement de mariage à des personnes qui n’ont pas la foi alors que tous les autres sacrements la requièrent devient de plus en plus incompréhensible. D’ailleurs, la plupart des sacrements de mariage sont aujourd’hui célébrés sans le rite eucharistique au motif du manque de pratique et de compréhension de ce sacrement (nouvelle incohérence).
Les accueillir sans jugement ouvre la porte à l’Evangile : Ils viennent à la préparation au mariage souvent avec la crainte que leur soit reprochée leur situation de conjugalité. Ils expriment souvent leur surprise que leur itinéraire de vie soit accueilli et qu’un chemin soit ouvert à partir de leur histoire : Au lieu d’entendre un discours moral, ils entendent une parole de témoins, alors la parole de Dieu devient davantage crédible. Nous croyons que nous avons à favoriser une expérience de « révélation » de Dieu, ce qui est toujours de l’ordre d’un surgissement qui ne nous appartient pas. L’inattendu de Dieu n’est pas au bout de nos efforts ou de notre prédication mais néanmoins nous pouvons préparer la route au Seigneur. Nous ne cherchons donc pas d’abord à leur donner un savoir religieux, mais à leur faire découvrir la source de leur soif comme Jésus dans son dialogue avec la Samaritaine.
L’accompagnement des couples mixtes est un défi : Au moins 50% des couples sont mixtes, baptisé et non baptisé, ou baptisé confessant la foi chrétienne et baptisé agnostique. De même, un peu moins de 10% sont des couples avec disparité de culte, islamo-chrétien ou judéo-chrétien. Les couples mixtes sont donc assez nombreux au sein des forces vives de nos communautés chrétiennes. C’est souvent ces conjoints qui provoquent les questionnements les plus pertinents dans les rencontres. La difficulté est ensuite de pouvoir leur offrir des espaces de partage et de cheminement durables. Mais ceci exige une véritable hospitalité et une expression de foi qui donne une vraie place à chacun dans son cheminement.
Le respect du sacrement et des personnes invite à explorer d’autres formes de célébration : Cela pourrait prendre la forme d’un catéchuménat en vue du mariage sacramentel, avec un cheminement et des étapes célébrées et la possibilité de ne pas aller jusqu’au sacrement. Une telle approche maintiendrait une présence de l’Eglise à cet instant important de la vie humaine et qui est un véritable terrain d’évangélisation et de mission. Déjà, beaucoup de prêtres et de diacres de la Mission de France et d’autres diocèses sont sollicités par des couples qui veulent donner une dimension profonde à leur engagement de couple, sans pour autant recevoir le sacrement car ils perçoivent que leur foi ne correspond pas en tout à celle de l’Eglise.
L’accompagnement des couples et des familles tout au long de la vie est nécessaire. C’est une grâce lorsqu’un mariage et une famille réussissent. Cela ne peut se réaliser sans le soutien de la communauté chrétienne. Nous soulignons en particulier les enjeux de dignité et d'égalité de l'homme et de la femme dans la transformation et la multiplication des modèles familiaux. En quoi une pastorale familiale liée au message de l'évangile et à la manière de faire de Jésus peut-elle aider à une conversion dans ce domaine?
II. Ce que donne à penser la rencontre des personnes séparées-divorcées-remariées :
Leur rapport à l’Eglise :
La manière dont l’Eglise se positionne en matière de doctrine sacramentelle est source d’une grande incompréhension et d’une véritable souffrance. La majorité prend de la distance vis-à-vis de l’Eglise et se cantonne au mieux dans une foi individuelle sans aucun lien avec d’autres croyants. Beaucoup se croient excommuniés. Même des chrétiens engagés ont bien souvent l’impression qu’il n’y a plus de place pour eux en paroisse quand on leur dit que plus aucune responsabilité pastorale ne peut leur être confiée.
Personne, à part une minorité qui en fait un chemin spirituel d’ascèse, ne comprend pourquoi le fait de se remarier (ce qui veut dire oser redonner sa confiance et son amour à quelqu’un) empêche de recevoir les sacrements, source d’amour et de pardon pour vivre en cohérence avec l’Evangile. Comment affirmer d’une part qu’un catholique ne peut vivre pleinement sa foi sans les sacrements et d’autre part dire à certains catholiques que la Parole de Dieu suffit ?
Quand dans une famille les parents se sentent rejetés ou pas compris par l’Eglise, leurs enfants en sont très marqués. Car comment pourraient-ils se sentir accueillis eux-mêmes si leurs parents ne le sont pas ? Certaines familles transmettent ainsi de génération en génération un anticléricalisme farouche et il faudrait beaucoup de rencontres personnelles positives avec des chrétiens, en particulier avec des prêtres, pour commencer un chemin de réconciliation.
Leur rapport à la foi :
Quand les personnes vivent l’épreuve de la séparation, du divorce, la foi est toujours éprouvée. Certains l’abandonnent car ils n’arrivent plus à concilier leur représentation d’un Dieu de toute bonté avec la réalité de la souffrance, du malheur et de la mort. Certains la redécouvrent plus vive, ayant vécu dans leur chair quelque chose de la mort et de la résurrection du Christ. Certains y viennent par conversion, ayant expérimenté quelque chose de la présence divine dans leur vie au cœur même de leur épreuve.
Il n’y a pas de vie sans passage par des formes d’errances, de non-sens, d’échecs… La relation vivante au Christ permet de découvrir que l’échec est une des dimensions du mystère Pascal que Lui-même a vécu. Ces chrétiens attendent de l’Eglise une attestation que leur vie n’est pas seulement un échec et que Dieu ne cesse de les mener à la vie, quel que soit le chemin engagé. La Bonne Nouvelle serait davantage audible pour eux si l’Eglise tenait davantage compte de l’expérience spirituelle, des conversions que chacun peut vivre à tout âge, et de ce que cela engage comme diversités de fidélités.
Le fait de connaître ou de rencontrer personnellement un prêtre ou des religieuses ou des chrétiens engagés est un grand soutien dans leur cheminement de foi. Les propositions de groupes de paroles sont aussi très appréciés car ils y trouvent une écoute sans jugement ce qui permet à chacun de faire du chemin et d’avancer en vérité. La Parole de Dieu et les sacrements deviennent pour eux révélation et présence de l’Amour manifesté en Jésus-Christ.
Leur rapport aux sacrements :
C’est la plupart du temps à cette étape de leur vie qu’ils découvrent que s’ils se remarient, ils ne pourront plus recevoir aucun des sacrements de l’Eglise. La première réaction est d’arrêter toute pratique religieuse ou de communier malgré tout. Pourquoi ? Parce que la théologie sacramentaire depuis Vatican II s’est déployée dans la logique de la Révélation d’un Dieu qui se donne à nous par amour car Il n’est lui-même qu’Amour. Les sacrements sont la manifestation en parole et en acte de la bonté de Dieu qui vient nous rejoindre en notre faiblesse pour nous donner sa force. Cet accent sur la bonté de Dieu plutôt que sur sa justice fait écho à la dimension affective sur laquelle s’appuie aujourd’hui essentiellement la construction d’un couple et d’une famille. Que l’Eglise ne puisse manifester la miséricorde de Dieu que par une interdiction est incompréhensible au point d’apparaître comme scandaleuse. Le fait que seules les personnes qui se remarient sont exclues des sacrements à vie est une autre source majeure d’incompréhension. Le message qu’elles comprennent est : « vous êtes des pécheurs impardonnables ». Or, elles ont traversé l’épreuve de la trahison, de la désillusion, de l’échec de ce à quoi elles croyaient de toutes leurs forces, elles ont fait tout un chemin de découverte d’elles-mêmes et de Dieu et un chemin de réconciliation au point de pouvoir à nouveau donner leur confiance et leur amour à quelqu’un d’autre et vivre. Ce chemin de mort et de résurrection, pourquoi ne peut-il être reconnu dans ce qu’il comporte aussi de grâce ?
Le fait de s’abstenir des sacrements est une situation tout à fait paradoxale pour un catholique qui se retrouve à vivre sa foi à la manière protestante, avec la seule parole de Dieu comme nourriture. Or les sacrements ont une dimension corporelle essentielle. La rencontre avec le Christ concerne notre être tout entier. Qu’engendrons-nous en privant délibérément des chrétiens de tous les sacrements sans aucun recours possible ? Ainsi demander à des personnes mariées de vivre en frère et sœur, n’est-ce pas amputer leur relation de cette dimension corporelle si indispensable à la vie d’un couple ? Le Christ lui-même n’a-t-il pas choisi de se donner sous une forme corporelle en disant : « prenez et mangez en tous » ?
La liberté de conscience que beaucoup prennent en la matière découle de la découverte de la Bonne Nouvelle du Christ-Jésus qui jamais ne condamne quiconque et qui paraît en totale contradiction avec l’actuelle pratique de l’Eglise en matière sacramentelle.
La simplification de la procédure de déclaration de nullité n’apparaît pas comme une bonne solution pour plusieurs raisons :
Le petit nombre de ceux qui y ont recours (actuellement cela représente 0.1% des divorces par an. Donc 99.9% n’y ont pas recours) le font car c’est la seule possibilité pour continuer d’avoir accès aux sacrements, s’ils désirent s’engager dans une autre relation matrimoniale.
Ce serait dévaloriser le sacrement de mariage que de continuer à le délivrer sans plus grand discernement et de le déclarer « nul » ensuite. Avoir recours de manière plus fréquente à cette pratique, c’est reconnaître qu’il y a un problème en amont, le fait de célébrer trop de mariage « nuls ». Or, nous avons déjà fait le constat que la plupart des couples qui demandent de se marier à l’Eglise, ne demandent pas le sacrement tel que l’Eglise le comprend.
Le terme « nullité » fait problème car s’il est pensé à un niveau juridique, les personnes l’entendent au niveau anthropologique. La logique de l’amour ne peut être enfermée dans la logique juridique. La plupart des personnes, même après l’échec très douloureux de la séparation, ne se voient pas déclarer nul le mariage auquel elles ont cru, les enfants qui en sont nés. Ce serait comme nier une partie de leur histoire. Beaucoup ne veulent pas faire vivre cela à leurs enfants. Il y a aussi la foi que Dieu accompagne son peuple dans les méandres de son histoire, et qu’il peut faire du neuf de l’ancien, sans effacer pour autant ce qui a été vécu (cf. l’histoire biblique de Jacob et de tout le peuple d’Israël).
Cela demande de l’énergie, du temps, de l’argent : c’est un obstacle pour beaucoup de personnes, en particulier parmi les plus modestes.
Positivement, cela demande d’inventer un autre type d’accompagnement et de reconnaissance qui mette l’accent sur tout ce que les personnes mettent en œuvre du point de vue humain et spirituel dans l’ordre du soin des relations, de la confiance, du pardon à partir de l’échec traversé et assumé. Cela demanderait aussi de ré-envisager des possibilités de réintégration sacramentelle.
L’expérience des temps de prière à l’occasion d’une nouvelle union :
Un texte d’orientation a été voté par les évêques de France en 2002 en faveur d’un temps de prière qui ne présente pas les signes extérieurs d’un mariage sacramentel.
La possibilité de ce temps de prière est l’occasion d’une préparation qui favorise un véritable cheminement de foi. Cela oblige les personnes à clarifier leur demande, à élaborer davantage leur projet de vie en prenant le temps de relire leur histoire, et en particulier l’histoire de leur première union. C’est aussi bien souvent l’occasion d’une catéchèse, d’un approfondissement de leur démarche chrétienne. Ceux qui accompagnent ces personnes le font sur plusieurs rencontres comme dans la préparation au mariage.
C’est une expérience dont il faudrait tirer davantage profit pour avancer pastoralement dans l’accompagnement des familles recomposées.
Les répercussions au niveau du catéchuménat
La doctrine actuelle de l’Eglise crée des obstacles insurmontables pour un certain nombre de catéchumènes, de plus en plus nombreux. Un exemple : un certain nombre vient justement à la foi grâce à son conjoint. Mais si ce dernier est divorcé, il faudrait que le catéchumène se sépare de lui pour avoir accès aux sacrements. Cela en est arrivé à un tel point qu’au lieu de pouvoir se réjouir d’accueillir de nouveaux catéchumènes, les acteurs pastoraux commencent par redouter qu’ils vivent dans des situations qui les empêchent de recevoir le baptême.
Il y a donc à repenser à nouveaux frais ce qui est demandé aux personnes qui demandent le baptême, comme lors du Concile de Jérusalem (Actes des Apôtres). Comme l’écrit le pape François : « Saint Thomas d’Aquin soulignait que les préceptes donnés par le Christ et par les Apôtres au Peule de Dieu « sont très peu nombreux » (citant saint Augustin), il notait qu’on doit exiger avec modération les préceptes ajoutés par l’Eglise postérieurement « pour ne pas alourdir la vie aux fidèles » et transformer notre religion en un esclavage, quand « la miséricorde de Dieu a voulu qu’elle fût libre ». Et le pape ajoute : « Cet avertissement, fait il y a plusieurs siècles, a une terrible actualité. Il devrait être un des critères à considérer au moment de penser une réforme de l’Eglise et de sa prédication qui permette réellement de parvenir à tous ».
Ce que donne à penser la rencontre avec des familles engagées ou non en Eglise
La notion de loi naturelle est difficilement compatible avec les soubassements anthropologiques de la société européenne qui voit l'homme comme un être en devenir et non comme ayant dans son être une loi préexistante. Cela favorise davantage une foi chrétienne qui voit la vie comme un passage à accompagner au lieu de la penser comme un idéal à réaliser. La réflexion de Philippe Bach, jésuite belge nous paraît essentielle à ce sujet : « Quel est le critère moral suivi par la grande majorité des chrétiens mariés de notre région? Il est simple : se rendre mutuellement heureux, s’épanouir ensemble, se faire du bien, grandir en humanité en se respectant dans ses différences. D’où le noyau des valeurs principales de la vie familiale : se parler, s’écouter, essayer de se comprendre, accepter les divergences de points de vue, se faire plaisir, tenter de dépasser les frustrations, durer si possible dans l’amour mutuel pour toujours. […] Elles dessinent ce qu’on pourrait appeler : la vie du désir. C’est un premier obstacle à la « loi » naturelle qui évoque d’abord et avant tout l’obligation morale. […] Or les expressions : « précepte », « loi », « il faut », sonnent mal lorsqu’il s’agit d’éclairer la vie du désir. […] L’obligation morale intervient lorsqu’une difficulté se glisse dans le couple. Ils ne se comprennent plus, s’énervent mutuellement, deviennent un peu des étrangers l’un pour l’autre… A ces moments, ils durent dans la relation « par devoir », en se remettant en quelque sorte sous la loi, mais ils espèrent que le désir mutuel reprenne le dessus. Aborder le mariage par le biais de l’obligation, c’est l’envisager à partir de ses difficultés et non des sources de vie qu’il promeut. »
L’urgence est d’abord d’accueillir chacun tel qu’il est. Mettre en avant la « loi naturelle » pour juger de ce qui est régulier de ce qui ne l’est pas dans la vie des gens, exclut par sa définition même, du statut de « famille » un grand nombre de situations et de réalités familiales (familles recomposées, famille monoparentales, familles homosexuelles…). Est-il vraiment possible de continuer à s’appuyer sur ce concept tout en voulant proposer la Bonne Nouvelle du Christ à tous ? Dans une société où la majorité des personnes n’a pas de relation personnelle au Christ, la manière dont le Christ rencontrait chacun peut être aussi la nôtre. Jésus ne demandait pas aux gens s’ils vivaient selon la loi, au contraire des pharisiens. Jésus les rejoignait dans leur désir de vie et de salut, à partir de leur situation réelle. C’est la relation au Christ qui peut conduire chacun à vivre davantage selon la loi divine de l’Amour. L’Amour n’est pas une forme idéale de vie à mettre en œuvre. Il est un chemin, une vérité à apprendre à connaître, à aimer et à servir.
L’invitation dans Humanae Vitae à ce que la régulation des naissances soit un choix fait en couple n’est pas connue. Dans beaucoup de familles chrétiennes, il y a très peu de dialogue à ce sujet et ce sont les femmes seules qui assument la question et choisissent le mode de contraception. Cette dimension a été occultée sans doute à cause des interdits concernant la contraception « non-naturelle ». Aujourd’hui, la majorité des chrétiens suivent tranquillement leur conscience sans se préoccuper de ce que l’Eglise dit dans le domaine de la sexualité, car cela ne tient pas compte de la réalité, de ce qu’ils vivent au quotidien. Imposer une seule manière de faire en termes de régulation des naissances ne tient pas compte du fait que pour aimer une autre personne en vérité, cela demande beaucoup de dialogue, de connaissance de soi, de souplesse et de créativité pour s’ajuster à la différence.
La foi est une grâce à recevoir qu’on ne peut que proposer. Chaque parcours a une incidence sur l’entourage, mais cela reste mystérieux car personne ne réagit de la même façon. Ainsi, il y a des enfants, des jeunes, des adultes qui demandent le baptême alors que leurs parents se disent athées ou agnostiques. Par ailleurs, il y a des enfants, des jeunes qui se détournent de l’Eglise alors que leurs parents sont des chrétiens engagés dans une vie profondément cohérente avec leur foi. Certains y reviendront plus tard, quand ce sera l’occasion de réfléchir davantage au sens de leur vie. C’est le non-respect, le manque de confiance, l’absence d’amour, un légalisme intransigeant qui peuvent faire obstacle à la révélation de l’amour inconditionnel du Christ.
Dire que le sacrement de mariage représente l’union du Christ avec l’Eglise est aujourd’hui perçu comme démesuré, y compris par les couples chrétiens engagés fidèles. Le « démesuré » est en fait signifié par cette interdiction des sacrements pour ceux qui contractent une nouvelle union. L’indissolubilité n’est pas ce qui est remis en cause. Il y a à penser une indissolubilité du premier mariage qui laisse en même temps une porte pour ceux qui ne peuvent le vivre jusqu’au bout, et qui découvrent la profondeur de la foi lors d’une deuxième union.
CONCLUSION
Le temps est venu de ré-ouvrir le chantier pastoral et théologique de la sacramentaire afin que tous ceux qui ont rencontré le Christ crucifié et ressuscité et vivent de sa parole, puissent aussi en recevoir la présence corporelle. Il est temps de mettre fin à toutes les incohérences juridiques, théologiques et pastorales qui brouillent les repères de tout le monde et repenser l’accès aux sacrements selon des critères renouvelés (qui tiennent compte des dimensions historiques et relationnelles), afin de rester fidèles à l’Esprit Saint qui ne cesse de faire toutes choses nouvelles pour que l’Amour de Dieu continue de remplir les cœurs.
Continuer de susciter des chemins pour que la Bonne Nouvelle soit vraiment perçue comme telle par tous, ce qui veut dire en premier lieu par les plus pauvres, tel est notre désir le plus vif.
Contacts :
Arnaud Favart, vicaire général, vicairegeneral-mdf@sfr.fr
Marie-Odile Pontier, coordinatrice des réseaux, reseaux-cmdf@club-internet.fr
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