Famille ROM

Alors que les Roms continuent à être victimes de discriminations inacceptables, le Secours Catholique réagit aux propos récents du ministre de l’Intérieur, et dénonce quelques contre-vérités sans cesse martelées.

Un an après l’entrée en vigueur d’une circulaire censée améliorer les conditions d’intégrations des Roms, force est de constater que leur situation ne s’arrange guère, bien au contraire.

En début de semaine, Manuel Valls a de nouveau pris les Roms pour cible. « Les propos récents du ministre de l’Intérieur sont consternants, réagit Bernard Thibaud, le secrétaire général du Secours Catholique. Reconnaître les difficultés et les tensions qui existent dans un certain nombre de communes du fait des conditions de vie très précaires des familles Roms est une chose, mais désigner - comme le fait M. Valls - une population entière, sur la seule base de son appartenance ethnique, sur des considérations générales stigmatisantes, comme "non intégrable", indésirable et donc devant être expulsée du territoire place le débat à un tout autre niveau : la vision qu’il exprime à travers ses propos est contraire à toutes les valeurs que l’on défend ».

Le Secours Catholique tient à dénoncer des contre-vérités déjà recensées par le collectif Romeurope dans un guide intitulé « Les Roms, luttons contre les idées reçues ».

1. "Les Roms sont des gens du voyage"

L’expression “gens du voyage” désigne un statut créé par l’administration française en 1969 pour les personnes qui n’ont pas de domicile ou de résidence fixe et habitent dans des caravanes ou des mobile-home. Cette notion ne comporte aucune connotation ethnique ou communautariste. Estimés à 400 000 personnes en France, les gens du voyage possèdent pour la très grande majorité la nationalité française. Ils appartiennent à des cultures diverses et ont un mode de vie traditionnel fondé à l’origine sur la mobilité et le voyage. Les Roms sont au contraire un peuple sédentaire à l’origine. Ils ont émigré en France pour fuir les difficultés économiques et les discriminations dont ils souffraient dans leur pays. La plupart d’entre eux étaient travailleurs salariés pendant la période communiste. Quand les régimes communistes sont tombés, les Roms se sont souvent retrouvés sans emploi. Ils se sont alors inscrits dans des logiques de travail migratoire. Les Roms qui vivent en France sont originaires d’Europe de l’Est : Roumanie, Bulgarie et Hongrie, principalement. Ils ne sont que 15 000 à 20 000 en France selon le Conseil de l’Europe.

2. "Les Roms ne veulent pas travailler"

La libre circulation des travailleurs est l’un des principes fondamentaux de l’Union européenne. Il donne le droit à tout ressortissant d’un État membre d’exercer une activité salariée sur le territoire d’un autre État membre. Mais les traités d’adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie à l’Union européenne ont autorisé les anciens États membres à déroger temporairement à ce principe, en restreignant l’accès à leur marché du travail pour les ressortissants de ces pays, durant une période transitoire. Les Roms n’ont ainsi accès qu’à 291 métiers dits “en tension”, après la délivrance d’un permis de travail et le versement d’une taxe à l’OFII (Office français de l’immigration et de l’intégration) par l’employeur. Or très rares sont les employeurs qui acceptent de payer cette taxe. Les Roms sont donc, de fait, dans l’impossibilité de trouver un emploi.

3. "Les Roms profitent des prestations sociales"

En France, les ressortissants de l’Union européenne peuvent bénéficier du système de protection sociale… à condition qu’ils bénéficient d’un droit au séjour. Or, le droit au séjour lui-même est soumis à la condition de bénéficier de ressources suffisantes – quasi impossible pour les Roms, qui n’ont pas accès au marché du travail (voir paragraphe précédent). Dans les faits donc, ils ne bénéficient que de l’Aide médicale d’État (AME), destinée aux personnes résidant en France en situation irrégulière depuis plus de trois mois. Or, le taux de personnes dont les soins de santé sont effectivement pris en charge par l’AME n’est pas plus élevé au sein de la population rom que dans d’autres populations… Preuve qu’ils n’émigrent pas en France pour bénéficier des prestations sociales, mais bien qu’ils se font soigner parce qu’ils en ont besoin.

4. "Les Roms sont sales"

Dans son rapport 2009-2010, le Collectif Romeurope note que sur 75 installations de bidonvilles en Seine-Saint-Denis, seule une vingtaine disposait de toilettes artisanales (réalisées par les Roms) ou pour quelques-unes de toilettes sèches. Une douzaine disposait d’un point d’eau sur place, dans les autres cas le point d’eau (souvent des bornes incendie) était situé à 15 minutes en moyenne du lieu de vie. Par ailleurs, sur la plupart des terrains il n’y a pas d’accès à l’électricité, si ce n’est par des branchements de fortune et grâce à des générateurs électriques qui ne sont pas sans danger. Plusieurs personnes dont des enfants ont ainsi trouvé la mort en 2010. Les demandes répétées aux collectivités locales pour qu’elles assurent le ramassage des ordures, les branchements nécessaires et au moins la présence d’extincteurs sur les terrains, sont le plus souvent ignorées.

5. "Les Roms ne veulent pas envoyer leurs enfants à l’école"

Comment faire de la scolarisation de ses enfants une priorité quand on lutte pour manger, dormir, se soigner ? Avec quel argent payer les fournitures scolaires, la cantine, les transports ? Et pour les enfants qui vivent en bidonville, comment apprendre le ventre vide, faire ses devoirs dans de bonnes conditions ? C’est à ces dilemmes que sont confrontées les familles roms, pour qui envoyer les enfants à l’école est bien plus compliqué qu’il n’y paraît. D’autant que plusieurs mairesrefusent, malgré l’obligation qui leur est faite, de scolariser les enfants roms. Enfin, les évacuations à répétition des campements obligent les familles à se déplacer parfois très loin de l’école dans laquelle sont scolarisés les enfants.

Marina Bellot

 

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