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« Quand les missionnaires sont arrivés ils n’avaient que leur Bible. Aujourd’hui ils ont toutes nos terres ; il ne nous reste que la Bible... »

                A l’arrivée des colons en 1604, la population autochtone était d’environ 30 000. Aujourd’hui, ils sont environ 6000, fragilisés par l’alcool et l’assistanat, menacés depuis peu par une inquiétante épidémie de suicide chez les 12-13 ans. Certains chocs culturels s’apparentent à des génocides... Quel avenir pour Eluane, mon jeune filleul amérindien ? Qu’a- t-on fait de ces peuples qui avaient créé une osmose si magnifique avec la nature, et élaboré cette sagesse qui fait dire à la maman d’Eluane « Tu sais, monsieur Serge, un indien tout seul, il n’est personne » !

              « Monsieur, la Guyane n’est pas un pays trépident », réponse à un métropolitain impatient...

              Attendre est ici un mode de vie. J’attends pour retirer de l’argent. J’attends depuis deux ans mon affiliation à la sécurité sociale. J’attends la pièce détachée commandée en métropole. J’attends la réparation de mon ordinateur de bureau... Une mère peut faire la queue plus de huit heures pour toucher ses allocations familiales. La métropole a fait le choix des aides sociales plutôt que d’un vrai projet de développement. Dans l’Ouest, le taux de chômage des jeunes est de plus de 50 %. Le mal d’intégration n’est-il pas plutôt réaction de frustration et d’exclusion ?

            « Oh, vous les Européens, vous comptez tout », exclamation d’une femme à qui je demandais combien elle avait d’enfants.

            La maternité de Saint-Laurent est la plus grande maternité de France. Il y naît chaque semaine l’équivalent d’une classe maternelle. A l’Aide Sociale, nous ne comptons plus le nombre d’enfants confiés. Abandonnés, exploités, battus, violents et violés, ils deviennent des enfants « placés » sur le modèle des enfants de la DASS d’il y a cinquante ans. Notre petite équipe, chevronnée et « teigneuse », essaie de faire cesser ce massacre des innocents. Si je reste en Guyane, c’est pour cela. Si j’en pars, c’est parce que j’aurais renoncé. Que Dieu nous prenne en pitié !

           « En Guyane, et nulle part ailleurs », slogan de l’Office du Tourisme. Arrivé depuis trois ans, je ne suis pas encore inculturé ; mais je peux dire : « Seigneur, je te rends grâce de m’avoir choisi pour servir en ta présence »... En Guyane et nulle part ailleurs.

Serge BAQUE

              Lettre d’Information de la Communauté Mission de France

              N° 352 Janvier 2013 page 3

 

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