Le Bon Samaritain (Eugène Delacroix) Huile sur toile, 37 x 30 cm, 1849.

Le Bon Samaritain (Eugène Delacroix) Huile sur toile, 37 x 30 cm, 1849.

Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 10, 25-37. 

« En ce temps-là, voici qu’un docteur de la Loi se leva et mit Jésus à l’épreuve en disant : « Maître, que dois-je faire pour avoir en héritage la vie éternelle ? »
Jésus lui demanda : « Dans la Loi, qu’y a-t-il d’écrit ? Et comment lis-tu ? »
L’autre répondit : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force et de toute ton intelligence, et ton prochain comme toi-même. »
Jésus lui dit : « Tu as répondu correctement. Fais ainsi et tu vivras. »
Mais lui, voulant se justifier, dit à Jésus : « Et qui est mon prochain ? »
Jésus reprit la parole : « Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho, et il tomba sur des bandits ; ceux-ci, après l’avoir dépouillé et roué de coups, s’en allèrent, le laissant à moitié mort.
Par hasard, un prêtre descendait par ce chemin ; il le vit et passa de l’autre côté.
De même un lévite arriva à cet endroit ; il le vit et passa de l’autre côté.
Mais un Samaritain, qui était en route, arriva près de lui ; il le vit et fut saisi de compassion.
Il s’approcha, et pansa ses blessures en y versant de l’huile et du vin ; puis il le chargea sur sa propre monture, le conduisit dans une auberge et prit soin de lui.
Le lendemain, il sortit deux pièces d’argent, et les donna à l’aubergiste, en lui disant : “Prends soin de lui ; tout ce que tu auras dépensé en plus, je te le rendrai quand je repasserai.”
Lequel des trois, à ton avis, a été le prochain de l’homme tombé aux mains des bandits ? »
Le docteur de la Loi répondit : « Celui qui a fait preuve de pitié envers lui. » Jésus lui dit : « Va, et toi aussi, fais de même. »

Homélie

Avec le « Bon Samaritain », une porte s'ouvre toute grande : le prochain peut être n'importe qui, sans distinction de proximité géographique, de parenté, de culture, de religion.

Qui est mon prochain ? demande le légiste. La réponse est donnée à la fin : ton prochain est chaque être humain avec qui tu crées une relation qui n'existait pas auparavant.

Le samaritain s'est fait proche de l'homme tombé à terre. Et le Christ invite le docteur de la Loi à « faire de même » : enseigner la Loi, c'est bien ; la vivre, c'est mieux. Et ce n'est pas un luxe : « Fais ainsi, dit Jésus, et tu auras la vie ». Faire vivre l'autre est ce qui nous rend vivants. Tout homme, quel qu'il soit, même s'il est très loin de nous par sa culture et ses valeurs morales, devient notre prochain quand nous nous approchons de lui. Quelle bonne nouvelle pour notre humanité ! Une bonne nouvelle qui conteste tout esprit de clan et de nationalisme étroit.

 Le Samaritain ne se demande pas si le blessé est juif ou non, compatriote ou étranger, ami ou ennemi : il lui suffit de se trouver en présence d'un homme en difficulté pour s'approcher de lui.

 Derrière le visage du Samaritain se profile le visage du Christ, le visage de celui qui a voulu se faire proche de tout homme. D'ailleurs, ne se fait-il pas le prochain de ce docteur de la Loi pourtant si loin de lui ? Cet homme l'interroge non pour créer des liens d'amitié, mais pour le piéger. Jésus, pourtant, se prête au dialogue. Il l'interroge, le fait parler, non pour le piéger, mais pour l'instruire, le « soigner ». Par là, Jésus est déjà dans la situation du « Bon Samaritain », mais il y a beaucoup plus ; n'est-il pas, pour nous tous, l'étranger par excellence, celui qui vient d'ailleurs, de Dieu même ? Il vient du Père, il se déplace - et quel déplacement !- pour se faire notre prochain. A travers les sacrements, les signes qu'il donne, il se révèle comme notre thérapeute, versant sur nos plaies l'huile et le vin.

 L'auberge où il conduit le blessé fait penser à celle d'Emmaüs, cette auberge où nous venons reprendre force et courage chaque dimanche. Je vous invite aussi à contempler le Christ dans l'homme blessé, tombé à terre. « J'ai eu faim et vous m'avez donné à manger »… On a envie d'ajouter : blessé, dans le fossé et vous m'avez pris en charge. Et encore : crucifié, transpercé et vous avez tourné les yeux vers moi. Le Christ s'est identifié à toutes nos victimes, à toutes les victimes de la guerre,  de la maladie, des cataclysmes, des comportements criminels. Nous faisant « prochains » de ces hommes, nous nous faisons prochains de Lui. Alors, si on demande à Jésus : Qui donc est mon prochain ? », il nous répond : « à Toi de décider jusqu'où tu acceptes de te faire proche ». A tous ceux qui, comme le légiste, cherchent le chemin de la vie, Jésus enseigne une route toute simple : celle qui descend de Jérusalem à Jéricho, la route où cheminent les hommes et où se côtoient ceux qui passent et ceux qui sont tombés. C'est là que nous pouvons supprimer la distance qui nous sépare les uns des autres et devenir prochains. Aujourd'hui, apprenons à nous arrêter : la vie éternelle n'est pas au bout de la route, elle est là, parmi les hommes nos frères.

C'est maintenant que nous pouvons aimer comme Jésus aime.

Louis DURET
Prêtre du Diocèse de Chambéry

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