Reportage photo lors de la messe anniversaire un an après la mort de Don Josimo Tavares le 11 mai 1987 à Saint Sébastien de Tocantins (Brésil)
J’ai voyagé au Brésil du 15 avril au 15 mai 1987, il y aura 30 ans en 2017.
J’ai visité des amis à Curitiba (dans le Sud), les équipes de la Mission de France à Belo Horizonte, des Favellas à Rio, des camps de « paysans sans terres » à Goiania et à Goias. Tous les amis m’ont invité à participer à un grand moment de la vie de l’Eglise au Brésil : les manifestations et la messe à l’occasion du premier anniversaire de l’assassinat de Don Josimo Tavares martyr des « paysans sans terres », président de la Commission Pastorale de la Terre (CPT) et curé de paroisse à Saint Sébastien de Tocantins, assassiné le 10 mai 1986 par des tueurs à gage des grands propriétaires.
Trois grands propriétaires ont été condamnés 11 ans après les faits (en 1997) à des peines de 17 à 19 ans de prison.
Le 10 mai 1987 au soir nous avons dévoilé une plaque à Imperatriz, à l’entrée même de l’immeuble où Don José a été assassiné. Don Tomas Balduino m’a demandé de prendre la parole au nom de l’Eglise de France et a traduit mes propos en Brésilien.
Le 11 mai 1987 à midi plus de 5.000 personnes (pour la plupart des « sans terres ») venant de toute cette région du « Bec de Perroquet » au Nord du Brésil ont participé à une marche réclamant « justice » qui convergeait sur le cœur du village de Saint Sébastien où Don Josimo était curé.
La messe était présidée par les évêques Don Tomas Balduino, Don Pedro Casaldaliga et Don Ervin Kraütler (évêques de la CPT) et d’autres.
Je suis l’auteur des photos que je vous présente ci-dessous et que j’ai rapportées en 1987 du Brésil.
Vous reconnaitrez parmi les prêtres et évêques, Dona Olinda, la maman de Don Josimo.
Qui est JOSIMO MORAIS TAVARES ?
Prêtre noir de trente-trois ans. Curé de Sào Sebastiâo do Tocantins, dans l'Etat de Goias. Assassiné par balle dans le dos au centre- ville d'Imperatriz.
Un mois auparavant, il échappe miraculeusement à un attentat. Il connaît les assassins. Et son itinéraire, sur les pas de Jésus, ne peut qu'aboutir au martyre. Encore enfant, une petite soeur mort-néé, seul avec sa mère, tous deux abandonnés par le père, ils quittent l'Etat du Para au moment d'inondations et partent pour Xamboïa.
Josimo décide dès l'enfance d'être prêtre. Il entre au séminaire et termine sa formation à Petro- polis où il fait sa théologie avec Leonardo Boff comme professeur. Il est ordonné prêtre en 1979 à Xamboia, où il travaille avec les jeunes et les paysans, tout en étant responsable de la pastorale d'ensemble pour le diocèse.
A Sâo Sebastiâo, il devient le coordinateur de la Commission pastorale de la terre (CPT) du diocèse de Tocantinopolis. Infatigable, il aide les paysans à organiser leur syndicat et à réclamer la réforme agraire récemment décidée par le gouvernement. La moindre victoire des paysans fait grandir la haine des propriétaires terriens.
Avec l'intuition de sa mort, le 27 avril, face à l'assemblée diocésaine réunie ce jour-là, Josimo expose calmement, directement, presque joyeusement, les raisons pour lesquelles il est menacé. Il dit en particulier: "J'ai fait mienne la ligne pastorale qui m'a amené, par la force de l'Evangile, à m'engager dans la cause des pauvres, des opprimés, des victimes de l'injustice. Le disciple n'est pas plus grand que son maître. 'S'ils m'ont persécuté, ils vous persécuteront aussi.' Je suis maintenant en plein dans le combat pour les cultivateurs pauvres et sans défense, un peuple opprimé dans les griffes de la grande propriété. Si je me tais, qui les défendra?"
Ses dernières paroles, avant de mourir, sont pour sa mère, Mme Olinda: "Ma mère n'a que moi au monde. Vous prendrez soin d'elle." Les évêques s'adressent directement au président de la République pour demander une protection en faveur de Josimo, après le premier attentat contre lui.
Mais il faut qu'il meure pour que le Brésil découvre qui est suspecté de la mort du prêtre, à savoir l'Union démocratique rurale,une organisation de propriétaires terriens aux étranges milices locales, soutenue officiellement dans certains Etats. Quatre mille paysans, une centaine de religieuses, une cinquantaine de prêtres et dix évêques accompagnent le corps de Josimo jusqu'au cimetière.
Mgr Pedro Casaldaliga, évêque de Sâo Félix do Araguâia, dit devant la tombe: "La terre de Goias, fécondée par le sang de Josimo et de tant de paysans, arrosée par les larmes de tant de mères, de veuves et d'orphelins, va se couvrir des fruits merveilleux de l'Evangile" (+ 1986).
Charles ANTOINE
Diffusion de l’Information sur l’Amérique Latine (D.I.A.L. 1992)