Mardi 10 juin à 20h30 au presbytère de la Collégiale à Vernon (Eure) un groupe de chrétiens divorcés et divorcés remariés se met en route. J'aurai la responsabilité d'en être le prêtre référent. Voici, avec les animateurs dans quel état d'esprit nous allons faire route ensemble :

Depuis plus de quinze ans, Guy de Lachaux, prêtre du diocèse d'Évry, s'engage pour améliorer l'accueil des personnes divorcées dans l'Église catholique. Son dernier livre en témoigne

C’est un appel que Guy de Lachaux lance à son Église. Appel que ce prêtre du diocèse d’Évry a mûri depuis plus de quinze ans en accompagnant des personnes séparées, divorcées, et divorcées remariées. Dans son dernier ouvrage, Accueillir les divorcés. L’Évangile nous presse (1), il invite les communautés chrétiennes à se laisser toucher par la souffrance de ceux qui traversent l’échec de leur couple.

« Le divorce pose des questions bien réelles, face auxquelles il est difficile d’accepter que les réponses actuelles soient vraiment conformes à la volonté du Christ, plaide-t-il. C’est pourquoi il faut être réaliste : les divorcés lancent un défi à l’Église. »

Ce prêtre l’avoue avec simplicité, il a appris la « souffrance humaine » auprès des divorcés. « J’ai honte aujourd’hui de le dire, je ne pensais pas que le divorce pouvait engendrer une telle douleur, reconnaît-il. Je crois même avoir rarement vu des gens autant souffrir. » Sans jeter la pierre à son Église, « qui a beaucoup progressé dans la prise en compte de cette question depuis une quinzaine d’années », il pointe la « nécessité », « l’urgence » d’une mobilisation.

« Dans l’Église, nous parlons beaucoup d’accueil et nous avons raison, souligne-t-il. Mais combien de fois ai-je reçu des personnes qui disaient avoir eu l’impression de se faire éconduire. » Méconnaissance de leur situation, gêne, discours ambigu et variable selon les diocèses et les paroisses compliquent la chose… Partageant son expérience, Guy de Lachaux propose ici un parcours sous forme de fiches pratiques pour un accueil adapté. Chacune marque une étape dans un chemin de reconstruction : « Exprimer sa souffrance et l’apprivoiser », « Changer son regard », « Se sentir coupable », « Lâcher prise », « Se découvrir autre », « Pardonner, se pardonner »…

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Un cheminement vers la réintégration sacramentelle ?

L’incompréhension, parfois la révolte, devant les règles canoniques, Guy de Lachaux les a entendues. Dans son livre, il propose d’ouvrir la possibilité d’une réintégration sacramentelle des divorcés remariés. Pas de n’importe quelle manière, mais après un cheminement humain et spirituel au bout duquel ce prêtre pense que l’on pourrait prendre « acte qu’une nouvelle union ne peut pas incarner à vie une infidélité au sacrement de mariage et donc couper de tout acte sacramentel ».

Dans le sillage de Mgr Armand Le Bourgeois et de Mgr Jean-Charles Thomas – qui a préfacé son ouvrage –, le P. de Lachaux plaide pour que la pratique de l’orthodoxie, qui n’a jamais été condamnée du côté catholique, soit examinée. Celle-ci prévoit, sous certaines conditions, la possibilité de bénir une deuxième voire une troisième union.

Sortir de la logique du tout ou rien

Pour Yves Lecorre, l’Église en viendra à de telles solutions, avec le temps. Mais la question demeure complexe : « Les évêques sont devant un paysage de plus en plus contrasté, en tension entre d’un côté ceux qui ne veulent rien bouger et de l’autre ceux qui célèbrent des quasi-remariages. J’admire le courage de Guy de Lachaux et sa lucidité. Il prend le risque d’aller de l’avant. Mais comment aider les évêques à faire l’unité et à exercer leur rôle de miséricorde, je ne vois pas très bien… »

Sortir de la logique du tout ou rien semble être le désir de nombreux chrétiens. Pour Yves Lecorre, la demande des divorcés remariés a d’ailleurs, elle aussi, évolué avec le temps. « Il y a une dizaine d’années, ils demandaient à l’Église de déclarer que leur premier mariage ne valait rien et que seul le second était le vrai. Aujourd’hui, ils lui disent : “J’ai été marié, c’est un échec douloureux, mais ne me fermez pas la porte à une présence dans le peuple chrétien par des règles que je ne comprends pas.” »

Ces propositions conduiront-elles à des débats, des échanges, voire à des changements ? Guy de Lachaux se veut confiant, « optimiste » même : « Les communautés chrétiennes sont beaucoup plus sensibilisées à ce sujet aujourd’hui, mais l’augmentation du nombre des divorcés rend pressante l’urgence de l’accueil. »

Et de rappeler que tous les synodes diocésains ont évoqué la question des divorcés et demandé que la position catholique soit revisitée. « Les choses bougent et dans le bon sens, conclut-il. Derrière la rigidité de façade de la hiérarchie, je sens chez les évêques une réflexion, un désir de trouver des solutions. »

(1) Editions de l’Atelier

Elodie MAUROT, La Croix du 11 avril 2008


http://www.la-croix.com/article/index.jsp?docId=2334827&rubId=4078

 

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