Christ Roi 

Du second livre de Samuel 5,1-3

« Toutes les tribus d'Israël vinrent trouver David et lui dirent: « Nous sommes du même sang que toi ! » C'est ainsi que tous les anciens d'Israël vinrent trouver le roi à Hébron. Le roi David fit alliance avec eux devant le Seigneur. Ils donnèrent l'onction à David pour le faire roi sur Israël. »

Droit du sol, droit du sang

Fête du Christ-Roi: ce mot sonne mal aujourd'hui à nos oreilles de républicains...

Et pourtant, la littérature biblique foisonne de récits des épopées heureuses ou malheureuses des Rois. Les livres de Samuel et des Rois en particulier, rédigés probablement vers le VIe ou Vi: siècle av. J.-C., racontent avec force détails la période riche en événements des années 1100 à 1000 avant J.-C. Le petit peuple juif se cherche un roi pour le gouverner. Un guide, un rassembleur, un chef, tel sera le grand roi David autour de l'an 1000, oint par Samuel pour devenir roi d'Israël, un chef d'une dynastie qui par Joseph le charpentier, conduira à Jésus de Nazareth, le Christ, mot qui signifie l'Oint. La lecture de l'Evangile de Matthieu (1, 20) brosse en quelques lignes cette longue généalogie pleine de symboles qui va d'Abraham, culminant en David, jusqu'à Jésus.

Après David et Salomon, puis quelque cinq siècles plus tard, le roi Cyrus en 538 lève le blocus de Babylone et rassemble les tribusd'Israël, leur ouvrant la route vers Jérusalem (Is 40-41-42) : il sera le roi Sauveur, le Messie en qui tous les espoirs sont permis. Isaïe (48,14) dira de Cyrus que celui-ci est «l'ami de Yahvé qui accomplira (son) bon plaisir». C'est la période appelée « messianisme royal » : « Voici venir des jours, déclare le Seigneur, où je donnerai à David un Germe juste: il régnera en vrai roi, il agira avec intelligence, il exercera dans le pays le droit et la justice» Qr 23, 5).

L'attente d'un messie, dès Isaïe (VII 8, 9 et 10), se révèle différente. En effet, la tradition chrétienne reconnaît, en Emmanuel (7, 10), l'annonce voilée du Christ, Fils de Dieu. Grandit alors lentement l'idée que le salut pourrait ne pas venir seulement d'un homme, fût-il un grand roi, tel David, Salomon ou Cyrus. Mais que le Sauveur du monde c'est Dieu lui-même, celui qui a sauvé les Hébreux au temps de Moïse, celui qui les a nourris au désert en leur donnant la manne, celui qui leur confia une patrie (Is 7, 13). Jean le Baptiste, d'après l'évangéliste, (Jn 1, 18 et suivants), annonce que celui qui vient après lui est Sauveur du monde, celui qu'ont annoncé les prophètes. Il est le Roi du Ciel«Mon royaume n'est pas de ce monde, je ne suis venu dans le monde que pour rendre témoignage à la vérité»(Jn 18, 3 7). Jésus n'est plus un Messie-Roi, mais le Messie envoyé par Dieu : on parle alors d'un messianisme divin. Cet envoyé de Dieu bouleverse toutes les attentes des hommes. Loin de se révéler un puissant comme tentent de se montrer les rois et gouvernants de tous les temps, brandissant épées ou avions supersoniques chargés de bombes et d'électronique, il mène une vie simple (Le 2, 1-20), proche des petits, des pauvres, des blessés et rejetés de la vie. Il accomplit en son temps ce qu'Isaïe annonçait déjà dans les quatre Chants du serviteur (42, 49, 50 et 52). Un roi qui débute son règne dans l'humilité d'une crèche (Le 1, 30-32, 34) et qui meurt comme un malfaiteur sur une croix n'est guère sérieux! «Si tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même» (Le 23). C'est de ce roi pourtant que nous tenons notre filiation : un sang symbolique coule dans nos veines. « Vous, vous êtes une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte... » (1 P 2, 9), une sainteté acquise et offerte par le Sang et l'Amour de la Croix. Ce Messie, Dieu incarné sur la terre des humains en Jésus de Nazareth, homme parmi les hommes, a épousé l'intégralité de la nature humaine. Il fait souche et corps avec elle, il est le nouvel Adam qui sanctifie la terre par sa seule présence, lui donnant une dimension nouvelle : «Je vis un ciel nouveau, une terre nouvelle» (Ap 21,1), la Cité sainte qui est la demeure de Dieu et notre demeure.

La grandeur de Dieu se déploie dans la création, en chaque être : c'est un appel à vivre de cette plénitude ouvrant ainsi vers des horizons sans cesse nouveaux.

Bernard RIVIÈRE

 

Témoignage Chrétien n° 3563 du 21 novembre 2013 page 4

 

 

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