Homélie du dimanche 27 septembre 2015

Nombres 11, 25-29 ; Psaume 18 ; Jacques 5, 1-6 ; Marc 9, 38-43.45.47-48

“Eldad et Médad prophétisent… Moïse,… arrête-les !” – “Nous avons vu quelqu’un expulser les démons en ton nom ; nous l’en avons empêché, car il n’est pas de ceux qui nous suivent.” Avez-vous remarqué ? On est passé très vite de Toi (en ton Nom) à nous (il n’est pas de ceux qui nous suivent). Ça y est, les voilà propriétaires de la Bonne Nouvelle, détenteurs de l’exclusivité du Salut. Oh que voilà un réflexe bien rapide.

Moïse, arrête-lesJésus, arrête-les !” Ils ne sont pas des nôtres. – “Celle-là, je ne l’aime pas. Elle est mal habillée.” (au retour de l’école). – “Je ne veux pas voir les tiens tant qu’ils ne seront pas baptisés.” (une grand mère qui sélectionnait ses petits enfants). - “Celui-là, il fait partie d’une drôle de bande.” - “S’il n’était pas aussi fainéant, il s’en sortirait peut-être.” Et quand d’aventure ceux-là font quelque chose de bien, alors on est surpris, vexés même. Tout de même, Seigneur ! On croyait que c’était réservé à nous, tes bons enfants.

Pourtant, en son temps, déjà Moïse disait à Josué : “Serais-tu jaloux ? Ah ! Si le Seigneur pouvait faire de tout son peuple un peuple de prophètes !” Moïse le disait comme un souhait. Nous, nous savons que nous sommes tous des frères et des prophètes. Jésus nous l’a appris, lui le médiateur entre son Père et nous. En lui l’amour est tellement pur que le mal ne peut rien contre lui : sa résurrection en est le signe. Et par son Esprit nous sommes devenus des temples de Dieu, comme le disait Saint Paul aux chrétiens de Corinthe :Vos corps sont les Temples de l’Esprit”. C’est aussi ce que dit joliment Gérard Bessière : “N’importe qui – un enfant, un pauvre, un malade, – peut prêter à l’Esprit ses lèvres et ses mains.” Et c’est encore le même message dans cette petite histoire de vitrail : “C’est qui, ces gens-là ?” demandait l’enfant à sa grand-mère, en montrant un vitrail. – “Ce sont les chrétiens !” répond la grand-mère. Et plus tard, à l’école, quand l’instituteur demande : “Qu’est-ce qu’un chrétien ?” l’enfant répond à peu près comme Saint Paul : “C’est quelqu’un à travers qui on voit la lumière.”

“Vous êtes les temples de Dieu”, disait Saint Paul. “Je vous enverrai l’Esprit. En fait vous le connaissez déjà puisqu’il est en vous”, disait Jésus (Jean 14, 17). Plus de barrière entre le profane et le sacré. Le seul lieu sacré est l’homme-fils de Dieu, et l’amour de Dieu et du prochain, sur nos chemins de joie et sur nos chemins de croix. Et quand notre corps sera détruit nous avons foi que Dieu – comme il l’a fait pour Jésus – le relèvera.

“Fais paraître dans ta vie un nouvel aspect du visage de Jésus que personne avant toi n’a su montrer comme tu sauras le faire.” C’est ce qu’on dit au nouveau baptisé. Bernard Feillet, dans son livre L’étincelle du divin, parle d’explorer le désir du mystère de Dieu qui habite chacun. Il parle de traquer dans l’homme la trace de l’infini. Il parle de creuser le mystère de l’homme, ce qui est, selon lui, aussi vertigineux que de chercher à découvrir le mystère de Dieu. Et sa fameuse phrase donne à penser : “Méditant ce que Jésus a été, ne cessant d’explorer sa vie et de vivre de son message, tant d’hommes ont découvert qu’ils étaient eux-aussi « capax Dei ». Et il continue : “L’homme humilié, l’homme torturé, l’homme massacré sont les témoins hallucinants que des hommes ont été capables d’anéantir eux-mêmes le mystère de Dieu. Ça a été le cas pour Jésus lui-même. Sa vision a provoqué une révolution dans le monde religieux. Ce n’est pas grave qu’il en soit mort, ce qui serait grave c’est que nous n’en vivions pas.”

Et dire qu’il y en a qui se demandent : “A quoi ça sert l’Eglise ?” J’entendais un jour : “Non ! La petite n’ira pas au caté. Il faut qu’elle aille à la danse. Et puis il faut aussi qu’elle apprenne à nager.” Et si c’était l’Eglise qui pouvait lui apprendre à danser et à nager dans la vie avec ses copains et ses copines ? Un groupe de 6è avait un jour trouvé une façon de le dire : “l’Eglise, c’est un lieu pour prendre du bon temps.” Ils parlaient comme mon ami théologien Jean-Yves Baziou : “La foi chrétienne, une raison de plus d’être en joie. Être chrétien n’est pas nécessaire, ça n’apporte rien de plus, mais ça donne une raison de plus de se réjouir d’être. L’Eglise pourrait être comme un sourire qui aide des jeunes à se réjouir d’être, à s’apprécier d’être humain et de pouvoir encore le devenir.”

Robert Tireau, prêtre du Diocèse de Rennes

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