Le jeudi Saint 2016 le pape François lave les pieds de Migrants dans un camp proche de Rome

Le jeudi Saint 2016 le pape François lave les pieds de Migrants dans un camp proche de Rome

C’est Henri Grouès (l’Abbé Pierre) qui l’écrit dans son testament (1994) : « Nous venons sur terre pour apprendre à aimer » !

« Car-Aime » : « Quarante jours pour apprendre à aimer » ! C’est un enfant qui m’a dit cette phrase un jour et j’ai mieux compris – depuis - le sens du « carême » !

En effet, si l’on observe la vie de Jésus on constate que juste après son baptême, il fut conduit au désert pendant quarante jours : quarante jours pour « apprendre à aimer ». Jésus est confronté aux forces du mal : le pouvoir dévoyé, la suffisance, l’orgueil. Il manifeste son choix de la liberté. Il est libre pour pouvoir « se donner » et devenir « serviteur ».

Il a fallu quarante ans au Peuple d’Israël libéré de l’esclavage d’Egypte pour prendre possession de la Terre Promise et surtout pour se déposséder de ses idoles, se libérer du mal et apprendre à aimer le vrai Dieu, apprendre à « s’aimer les uns les autres » !

Notre vie est trépidante et nous courrons sans cesse d’une chose à l’autre sans savoir très bien d’ailleurs après quoi nous courrons. Il est urgent que nous sachions nous arrêter, que nous prenions le temps d’apprendre à aimer !

Chaque année l’Eglise nous propose ce temps du carême pour faire le point, savoir où nous en sommes grâce à la boussole de notre vie qu’est « l’Amour ».

Est-ce que nous allons vers les autres ? Est-ce que nous arrivons à sortir de notre coquille, de nos peurs ? Est-ce que nous arrivons à nous libérer de nos enfermements, de notre orgueil, de notre égoïsme ?

Sortir de nos prisons, de nos prisons intérieures, nous libérer de nos paralysies, de tout ce qui nous empêche d’aller vers les autres. « N’ayez pas peur » nous dit Jésus au matin de Pâques. Pour pouvoir aimer il faut chasser la peur pour libérer l’amour.

J’aime bien ce mot d’Henri Grouès (l’Abbé Pierre) dans ses « confessions (2002) : « L'enfer, c'est les autres », écrivait Sartre. Je suis intimement convaincu du contraire. L'enfer, c'est soi-même coupé des autres. »

Voilà la révolution qui nous est proposée chaque année pour nous préparer à Pâques : « Aimer » !

« Aimer » est pourtant un mot bien galvaudé. Aimer « comme » Jésus, qu’est-ce que cela veut dire ?

« Dis-moi comment tu aimes, je te dirai qui est ton Dieu » (Maurice Bellet)

« L’autre est un don »

Dans sa lettre d’invitation au Carême 2017, le Pape François commente la parabole de Lazare et de l’homme riche (Luc 16,19-31). En voici un extrait : « La première invitation que nous adresse cette parabole est celle d’ouvrir la porte de notre cœur à l’autre car toute personne est un don, autant notre voisin que le pauvre que nous ne connaissons pas. Le Carême est un temps propice pour ouvrir la porte à ceux qui sont dans le besoin et reconnaître en eux le visage du Christ. Chacun de nous en croise sur son propre chemin. Toute vie qui vient à notre rencontre est un don et mérite accueil, respect, amour. La Parole de Dieu nous aide à ouvrir les yeux pour accueillir la vie et l’aimer, surtout lorsqu’elle est faible ».

Aimer gratuitement, aimer sans attendre de retour.

Pour aimer, à la manière de Jésus dans l’Evangile, il faut déjà prendre le risque de ne pas être aimé en retour. A l’Amour que nous lui donnons l’autre ne répond pas toujours et c’est peut-être là l’expérience humaine la plus difficile.

Lorsqu’on aide un « sans papier » à obtenir un titre de séjour, lorsqu’on héberge quelqu’un qui est en grande détresse, lorsque l’on donne de son temps à quelqu’un qui a besoin d’une oreille et d’un cœur qui l’écoute, il arrive que l’autre – fragile et blessé – n’éprouve pas le besoin de nous remercier. Cette attitude peut nous choquer. Aimer à la manière de Jésus, c’est aimer « gratuitement », sans attendre de « retour » !

Aimer aussi celui ou celle qui n'est pas aimable !

Apprendre à discerner derrière une carapace d'antipathie, l'amertume, la solitude, la détresse ! Voilà ce que peut rendre possible l'amour de Dieu. Il peut nous rendre capables de dépasser le contexte visible pour comprendre véritablement une personne et discerner ses besoins. Aimer, c'est voir l'autre tel que Dieu le voit et répondre à ses attentes. Et cet amour-là, lorsqu'il est manifesté, est irrésistible pour celui qui le reçoit.

Aimer c’est avoir « foi » en l’Autre, lui faire confiance, pour qu’à son tour il lui soit possible de s’aimer lui-même, ce qui le rendra « aimable » et capable d’amour pour les autres.

C’est le vrai cadeau que fait Jésus à tous ceux qu’il croise sur les chemins de Judée, de Samarie et de Galilée !

« Si tu crois que l'amour est la seule force de persuasion,
Si tu crois que la paix est possible,
alors la paix viendra. »
Pierre Guilbert

Belle route vers Pâques !

Denis Chautard

A Vernon, le 26 février 2017

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