L'église abbatiale de Pontigny n'est pas à vendre ; elle appartient à la commune. Le domaine de l'abbaye, lui, doit changer de main : de la Région à la fondation Schneider. © Jérémie FULLERINGER

L'église abbatiale de Pontigny n'est pas à vendre ; elle appartient à la commune. Le domaine de l'abbaye, lui, doit changer de main : de la Région à la fondation Schneider. © Jérémie FULLERINGER

Aucune surprise au conseil régional de Bourgogne Franche-Comté. Présidée par la socialiste Marie-Guite Dufay, la Région a voté "pour" le principe d'une cession du domaine de Pontigny à la fondation Schneider, moyennant 1,8 M €. Néanmoins, la vente ne se réalisera que si François Schneider réussit à trouver un "partenaire hôtelier" prêt à investir dans l'Yonne. Le projet de la Fraternité Saint-Pierre, lui, a été écarté, car jugé moins intéressant... et tout aussi risqué.
Deux projets étaient en lice. La fondation Schneider, qui veut élever un hôtel à côté de l'église abbatiale de Pontigny. Et la fraternité Saint-Pierre, qui compte implanter son séminaire de formation des prêtres. Ce vendredi 11 décembre, les conseillers régionaux de Bourgogne Franche-Comté ont voté "pour" le principe d'une cession du domaine de Pontigny à l'homme d'affaires François Schneider.
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Propriété de la Région depuis 2003, inutilisé par la collectivité, le domaine abbatial de Pontigny lui coûte plus de 200.000 € de charges d'entretien par an. "Nous avons décidé de nous en séparer. Avec un souhait : que ce lieu absolument sublime devienne, à l'avenir, un lieu attractif, qui draine beaucoup de monde autour d'une destination très belle", explique la présidente Marie-Guite Dufay (PS).
"Pontigny" le musée, la marque, l'hôtel, le restaurant
Selon elle, le projet de la fondation Schneider coche toutes les cases. Il prévoit de mener "sur ce site un grand projet de valorisation touristique et culturelle, avec un musée d'art contemporain dédié, en partie, à l'art cistercien", décrit la présidente. Il prévoit de "valoriser tous les produits qui peuvent être fabriqués sur les terres de Pontigny et de l’abbaye" : "du pain avec le blé", diverses préparations à base de "plantes"... "C'est un projet qui veut valoriser le concept de la terre nourricière, que l'on abîme aujourd'hui mais qu'il faut protéger", expose Marie-Guite Dufay. Autant de produits qui devraient être vendus sous la marque "Abbaye de Pontigny", déposée par la fondation Schneider à l'Institut national de la propriété industrielle en janvier 2020.
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À côté de cela, et c'est le nœud du dossier, un complexe hôtelier. "Un hôtel et un restaurant", expose la présidente. "Un bel hôtel, oui, même si je ne sais pas s'il sera de luxe. Et une table qui ne peut être que gastronomique dans un lieu pareil, à côté de Chablis..."
C'est là que les choses se compliquent. Estimé à 1,7 M €, le domaine de Pontigny doit être cédé pour 1,8 M €. Sauf que ce compromis de vente est assorti d'une "clause suspensive" : que la fondation Schneider trouve un "partenaire hôtelier" capable d'investir dans l'Yonne. Alors que la fraternité Saint-Pierre, elle, était prête à payer cash, et à faire un chèque de 2,1 M €.

"Vous, la gauche, allez privatiser le patrimoine régional"
L'opposition s'engouffre dans la brèche. Alain Joyandet (LR), président de la commission des finances, pointe deux "problèmes". D'abord, "la fraternité Saint-Pierre offre davantage d'argent que la fondation Schneider". Ensuite, "les clauses suspensives des deux dossiers ne sont pas du même ordre. Dans le projet de la fraternité, c'est l'avis d'un ecclésiastique, certes de haut rang, mais il n'y en a pas d'autre..."

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Côté RN, Julien Odoul estime qu'"il y a une opacité totale sur le dossier. Tout est biaisé depuis le début. Cela fait plus d'un an que tout est déjà ficelé, et pour preuve : l'abbaye de Pontigny a été déposée comme marque par la fondation Schneider en janvier 2020". L'Icaunais accuse Marie-Guite Dufay de "brader le patrimoine régional". "Vous, la gauche, allez privatiser le patrimoine régional pour un projet fumeux et risqué", s'exclame-t-il, qualifiant le projet Saint-Pierre de "concret".

Marie-Guite Dufay n'attendra pas la fumée blanche
Marie-Guite Dufay répond point par point. Elle assume de s'asseoir sur 300.000 €. "Je n’ai jamais dit que le prix serait un élément déterminant. Si la Fraternité a décidé de surenchérir, c'est leur position, mais ce n’est pas cela qui m'amènera à décider. Ce qui m’amène à décider, c'est le projet touristique et culturel porté par la fondation Schneider", qu'elle juge plus "ouvert au public". Elle affirme enfin que les "conditions suspensives" assorties au séminaire sont tout aussi risquées. "J’ai pris mes responsabilités ; j'ai pris des contacts", glisse la présidente socialiste. "Au sein de l'Église, les retours me laissent entendre que les conditions seront vraiment très, très difficiles à obtenir. Il faudra de toute façon, pour la fraternité Saint-Pierre, remonter jusqu’à Rome. Jusqu'à Rome !" Et attendre "deux ans, peut-être trois, peut-être quatre" avant que de la fumée blanche s'échappe du Vatican.

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La majorité socialiste a voté pour le principe d'une cession du domaine de Pontigny à la fondation Schneider. Le groupe de la droite et du centre n'a pas participé au vote – à l'exception de l'élu icaunais Éric Gentis (Agir), qui a voté pour. Le groupe du Rassemblement national, lui, a voté contre.

Romain Blanc
L'Yonne Républicaine

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