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Vous n’êtes pas trop rugby ? Dommage parce que ces temps-ci le monde parle ovale, respire ovale, se lit en ovale. Vous ne comprenez rien à ce sport agressif où trente corpulents gaillards se chicanent sans vergogne un drôle de ballon même pas rond ? Allez, un petit effort, entrez dans le choc fraternel d’un monde de gros bras.
La forme improbable de ce ballon le rend imprévisible comme notre planète qui ne tourne pas plus rond. Ce sport a des règles complexes, mais le jeu social impose des règlements autrement plus compliqués. La violence y est bien davantage canalisée que l’ordinaire des routes, du voisinage, du racisme ou de l’indifférence.
Nous voudrions vivre dans un monde cotonneux où la blessure et le risque zéro n’existent pas. Ici, seul le maillot est en coton, et on le mouille généreusement pour le combat de la vie.
Sport éducatif et collectif, le rugby revendique une approche de la vie où se côtoient l’affrontement et le respect de l’adversaire.
La loi impitoyable de ce sport n’est pas celle du plus fort, mais celle du respect inconditionnel de l’arbitre, représentant de la loi. Même dans le déchaînement passionné de la mêlée, le dernier mot revient au droit et à la justice. Ici le tricheur est sanctionné. On aimerait entendre siffler la même pénalité pour des affaires relevant de scandales économiques, politiques, ou de mœurs. Le plaisir du jeu ne va pas sans la faute, et donc cultive le sens de la responsabilité et de la discipline pour déployer un jeu durable.
Le rugby est un monde de libertés favorisées par le culte d’interdits majeurs, comme celui de la passe en avant. La croissance du jeu ne relève pas de la fuite en avant, mais d’un regard lucide sur les soutiens antérieurs. Qui entreprend doit cultiver le sens de la tradition et s’appuyer sur les leçons de l’histoire. Parce qu’il a appris à encaisser les coups du sort, le joueur de rugby apprend à relever la tête, à affronter l’adversité, et à répondre solidairement aux épreuves.
Enfin il y a une vie après le match, la fameuse troisième mi-temps conviviale, espérance d’un monde réconcilié après le combat.
La parabole ovale a bien des résonances avec l’Évangile, ne le pensez-vous pas ?
Arnaud FAVART
Prêtre de la Mission de France
 
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