« Être maire dans une petite commune, c’est un dévouement total, on ne dort pas chaque nuit »

Il y a les élections. Les coupures de ruban. Les vins d’honneur. Et puis, tout le reste. Qu’est-ce vraiment qu’être maire ? Au lendemain du premier tour des élections municipales, ils nous parlent de leur… métier.

« Être maire, ce n’est pas un métier, c’est un sacerdoce. Dans une petite commune, il faut tout faire, ça prend énormément de temps. » L’élu qui s’exprime a de la bouteille. Son « métier », il le sait d’expérience, requiert de déployer tout un arsenal de compétences. Mais, euh, pour les questions techniques, il y a le personnel municipal, non ? Cet édile multicasquettes nous détrompe.

« On doit tout gérer, les conflits de voisinage… Ce matin encore, j’ai dû prendre ma rasette pour m’occuper des fleurs »

« Nous, les maires des petites villes, on n’a pas de services techniques, pas de police. On doit tout gérer, les conflits de voisinage… Ce matin encore, j’ai dû prendre ma rasette pour m’occuper des fleurs. On est obligés de faire par nos propres moyens… Nous, les petites communes, on n’a plus le droit qu’à deux contrats. Une commune qui veut garder son école, elle en utilise déjà un pour ça. L’autre pour la garderie et la cuisine. Il ne reste rien pour la mairie. Alors on prend un gars à 20 h/semaine, mais on n’a pas les moyens, c’est difficile. » Ou alors, donc, on prend sa rasette. Au risque de saturer : à quelques kilomètres, « d ans l’Aisne, il y a une intercommunalité de onze communes. Sept maires vont arrêter. »

Tout est bon pour plaider la cause de sa commune. À condition de le pouvoir

Faute de personnel, on peut aussi prendre appui sur son équipe. « J’ai la chance d’avoir un adjoint avec lequel on a mis deux ans à se compléter, explique celui-ci, qui termine son premier mandat. Désormais, on forme un binôme : lui s’occupe de l’intérieur de la commune et moi, de l’extérieur. Tous ces syndicats extérieurs où il faut être. » Et hop, une casquette de VRP. « C’est beaucoup de relationnel. Un maire doit tenir sa place à beaucoup d’endroits. » Tout est bon pour plaider la cause de sa commune. À condition de le pouvoir : « J’essaie d’y aller au maximum dans la mesure où mes fonctions et ma vie professionnelle me le permettent. Quand vous devez terminer un chantier chez un client, vous n’arrêtez pas à 16 h pour aller à une réunion à Cambrai. »

Une autre casquette ? Celle-là est encombrante : la financière. « Le plus dur, c’est surtout d’avoir de l’argent. Il faut toujours se démener. Je ne sais pas si c’est un problème que nous avons en France, mais la passivité des services… quand même… Des fois, pour des choses qu’on pourrait faire en trois semaines, il faut six mois… »

Ah, les dossiers de subventions… Le lot quotidien des mairies. Pas toujours assurées d’être payées de retour : « On est une des communes les plus petites et les plus pauvres. C’est décourageant parce qu’on n’est pas souvent soutenu, ni aidé. On a besoin de se battre, témoigne celui-là. Être maire dans une petite commune, c’est un dévouement total. On met beaucoup de responsabilités sur le maire, mais en même temps, on n’en a pas les moyens techniques et financiers. »

Le maire est aussi l’élu de proximité. Et donc le premier relais des politiques des… autres. Cette année, « j’ai dû expliquer à des gens pourquoi ils étaient désormais imposés… », indique cet élu de longue date. Pointant par ailleurs « une explosion continuelle des contraintes administratives et réglementaires imposées par l’État, pas toujours compréhensibles par notre population. Ça agrandit encore le fossé… » « On n’a plus toutes les compétences, et sur ce qu’on ne peut pas faire, on subit. On va finir par ne plus en avoir du tout », croit savoir ce collègue.

« On ne dort pas toutes ses nuits »

En somme, « il faut correspondre de plus en plus aux attentes de la population avec de moins en moins de moyens… Faire des projets avec moins de subventions… Tout en mettant en place des trucs comme la réforme des rythmes scolaires qui va nous coûter bonbon… »

« On ne peut pas fonctionner avec légèreté, résume cet édile expérimenté. Aujourd’hui, mon mandat est quasiment un travail à temps plein… J’ai plus d’un millier d’âmes sous ma responsabilité. C’est une rigueur permanente. On ne dort pas toutes ses nuits. » Oui, conclut cet homologue, « on ne peut pas toujours faire tout ce qu’on a envie, mais ça c’est un peu comme dans la vie. Mais quand on y arrive, c’est énorme. » Oui, « c’est un métier maintenant. Mais il est passionnant ! »

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