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Après avec lu les comptes rendus des évènements de Thiberville du 3 janvier 2010 après en avoir vu les vidéos sur Internet après avoir lu les déchaînements d'insultes, de haine et de violence sur différents blogs, déchaînements qui m'ont profondément blessé et interpellé, je me suis souvenu de cette parole de sagesse du Mahatma Gandhi : "On obtient justice plus rapidement en rendant justice à la partie adverse !".

 

Bien entendu dans ce qui s’est produit à Thiberville  je dénonce, avec les instances du diocèse :

 

1°) Les insultes, la calomnie, la violence contre la personne de notre évêque et les personnes du Conseil Episcopal

2°) Qu'un prêtre ait pu faire de sa situation personnelle l'objet d'un conflit partisan qui divise les catholiques et qu'il en appelle au pape pour se « dédouaner » des engagements liés à son ordination !

3°) Qu'un prêtre n'ait pas été- par sa parole et par ses actes- un rempart contre la violence et contre l'insulte dans sa propre église.

 

Mais je crois vraiment que l'enjeu du débat au fond n'est pas l'application de telle ou telle réforme ou le respect de telle ou telle discipline, même si c’est ce qui « achoppe » apparemment !

L'enjeu, et il est de taille, me semble bien être cette double appartenance de notre ministère de prêtre : tradition et modernité - modernité et tradition.

Je ne suis pas curé de paroisse mais je suis solidaire et  je respecte infiniment mes frères prêtres qui assument cette lourde charge dans des conditions bien difficiles aujourd'hui.

Je suis prêtre de cette Mission de France, fondée en 1941 par le Cardinal Suhard Archevêque de Paris qui voulait abattre ce « mur » qui séparait l’Eglise des milieux populaires.

Je suis un prêtre en activité professionnelle ordonné par Monseigneur Gabriel Matagrin, Evêque de Grenoble, il y a 32 ans, le 4 février 1978 et envoyé vivre son ministère en plein coeur de la "modernité", comme Informaticien de la Caisse Nationale d'Allocations Familiales.

Il était déjà  loin ce serment "antimoderniste" que les prêtres étaient obligés de prononcer devant leur évêque avant d'être ordonnés ( qui était pourtant obligatoire de 1910 jusqu’à 1967, onze ans avant mon ordination ) !

Grâce au Concile Vatican II qui s'était terminé 13 ans auparavant et qui avait mis en lumière que la première mission du prêtre (avant même la célébration des sacrements et le fait d'être le Pasteur d'une communauté) c'est "d'annoncer l'Evangile à toute la Création " !

Annoncer l'Evangile, cela veut dire être soi-même "pétri" dans sa vie avec ce levain de la Parole de Dieu -  Parole qui « lève » en nous et qui donne ainsi – en nous - toute son actualité !

Une Parole d'Amour, de Paix, de Justice et de Fraternité universels...

Le prêtre est celui qui, à la suite de Jésus, franchit les barrières, abat les frontières et les murs entre les hommes. C'est celui qui travaille inlassablement à la Paix, à la Justice et à la Réconciliation en se mettant d'abord au service des petits et des pauvres !

C’est ce ministère même de la proximité que j’essaie de vivre.

J’ajoute que le jour même où j'ai été ordonné prêtre et envoyé vivre mon ministère au coeur le la "modernité", j'ai reçu un immense cadeau, celui de l'Abbé Briand qui avait été durant plus de 30 ans le Curé de Privas (en Ardèche), paroisse de mes parents. Ce prêtre "traditionnel" qui a porté très longtemps la soutane, mais qui était un homme d'une humilité et d'une bonté exceptionnelles, m' a offert, au soir de sa vie et le jour de mon ordination, le calice qu'il avait reçu lui-même le jour de son ordination (en 1920 environ) en me disant ces mots : "même si je ne comprends pas tout de ton ministère de prêtre au travail, je fais confiance à notre Eglise et je te transmets ce que j'ai reçu d'elle, ce sacrement d'union au Christ pour le salut du monde". Ce cadeau m'a bouleversé- il y a trente deux ans - et me bouleverse encore profondément aujourd'hui !

Dans la Tradition millénaire de l'Eglise il y a un immense trésor : «  la foi » et cette foi nous la recevons - nous ne la construisons pas à partir de rien !

Cette foi nous avons à la personnaliser, à l’adapter, à l'actualiser... mais nous avons toujours à la "recevoir" !

Elle n'est pas notre propriété et nous avons aussi, à notre tour, la responsabilité de la transmettre !

Derrière la « jacquerie » de Thiberville il y a évidemment un arrière fond politique, il y a bien sûr la pression de groupes extérieurs au diocèse qui jettent de l’huile sur le feu et qui « hurlent avec les loups » afin de provoquer conflits et divisions. Loin de moi l’idée de céder aux « dictats » de ces groupes de pression ! 

Mais lorsque des catholiques traditionnels ne comprennent pas nos réformes et qu'ils ne veulent pas entendre la logique rationnelle de nos équations arithmétiques : 1 prêtre pour 20.000 habitants, je crois qu'il faut écouter leur revendication à ne pas perdre ce qu'ils ont ici ou là : un prêtre proche de "sa" population ! Comme je l’ai fait remarquer d’emblée, « il nous faut rendre justice à la partie adverse ! ».

Un prêtre « proche », cela signifie une foi « à portée », un Evangile accessible au quotidien. Evidemment qu’avoir un prêtre « proche » cela a du sens !

Voila deux positions qui paraissent inconciliables : d'un côté la logique implacable des statistiques et de la réalité d'une église devenue minoritaire et d'un autre l’approche accrochée au passé et au modèle du Curé d'Ars (qui n'est pas transposable comme tel aujourd'hui).

Je n’ai pas de solution à la crise actuelle.

J’ai le sentiment que la solution ne nous sera pas donnée par Rome au travers d’une formule « clés en mains ». J’ai le sentiment aussi que la solution n’est ni dans une décision autoritaire ni également dans la politique de l’autruche (« ne rien faire »).

Nous entrons dans une période difficile où il faut nous donner comme horizon la sortie de crise – et comme moyen d’y parvenir - la négociation avec les paroissiens de Thiberville !

Nous sommes tous invités à l’action, au travail et à la prière !

 

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